Voilà un compère de cuisine pour le moins discret ! Au point que certains l’affublent du sobriquet de “bonne à tout faire des fourneaux” …

Ache des marais
Le céleri est utilisé depuis toujours, d’abord sous sa forme sauvage la “ache des marais” qu’on peut trouver au bord des rivières (attention, la ache sauvage est aujourd’hui protégée, notamment dans le Nord et le Pas-de-Calais).
On le cultive depuis la Renaissance. Et pour les néophytes, le céleri branche et le céleri rave sont deux cousins très proches, qui n’ont développé leurs caractéristiques que par le travail de sélection des botanistes.
Chacun sait qu’on devrait consommer beaucoup plus de légumes et le céleri, très peu calorique, n’est pas le moins pourvu de qualités en tous genres. Ses antioxydants font merveille dans la prévention des maladies cardio-vasculaires et des cancers. Et il contient de la “lutéoline” qui stimule les cerveaux vieillissants !
Le céleri est indispensable dans bon nombre de plat “bistrottiers” et notamment l’inévitable “pot au feu” de l’hiver. Mais attardons-nous un instant sur le savoureux céleri rémoulade devenu très “tendance” au même titre que l’œuf dur mayonnaise ou le poireau vinaigrette.
La sauce rémoulade était au départ une vinaigrette enrichie d’anchois, de câpres et d’herbes. On y ajoute ensuite un peu de velouté, puis de la moutarde. Arrive en 1806 André Viard qui remplace le velouté par un jaune d’œuf et enlève les anchois et les câpres. La mayonnaise est née ! Pour les puristes, la différence entre la mayonnaise et la rémoulade, c’est la moutarde, présente dans la mayonnaise, pas dans la rémoulade.

André Viard mérite qu’on s’attarde sur lui. Chef cuisinier depuis la période révolutionnaire, il édite en 1806 “Le cuisinier impérial” qui deviendra en 1817 “Le cuisinier royal“. 950 recettes répertoriées et codifiées. Ce manuel de référence connaîtra … 32 éditions jusqu’en 1875.
Viard accompagne Louis-Philippe de Ségur, ambassadeur de France à Saint-Pétersbourg. Il revient ensuite à Paris au service du richissime Francis Egerton, comte de Bridgewater, après un passage par Vienne et Londres avec le prestigieux juriste Cambacéres. Il décline l’invitation de George IV, futur roi d’Angleterre, à devenir son “officier de bouche”.

La tombe d’André Viard et ses trésors enfouis, au cimetière du père Lachaise
C’est un homme discret, au point qu’il est bien difficile de dégotter son portrait. Mais les caprices de ses différents patrons ont un peu déteint sur lui. Bien avant son décès, il fait construire sa tombe au Père Lachaise. Il exige que son cercueil soit assez grand pour qu’on accompagne sa dépouille de 1000 livres de sel et autant de son. Il interdit à ses 25 meilleurs amis de se recueillir devant sa tombe mais les invite à se rassembler chez un restaurateur autour d’un repas qu’il a commandé pour la somme de 1000 francs de l’époque, soit 94,80 € par personne, addition très confortable en 1834.
Le céleri est plein de ressources. Rave ou branche, il peut se décliner de multiples façons. Les branches coupées en fins tronçons donnent de la couleur et du goût à une salade, un morceau de poisson ou de viande. Avec les graines de céleri broyées, on peut faire du sel de céleri indispensable à la préparation du Bloody Mary (https://recettesahistoires.com/2022/10/05/le-brunch-une-mode-une-solution/).
Et les chefs les plus créatifs ne sont pas en reste pour en trouver de nouvelles déclinaisons.

Alain Passard
Alain Passard propose parfois dans son “Arpège” une pomme de céleri cuite en croûte de sel pendant trois heures, servie en entrée froide ou tiède avec une mayonnaise bien moutardée.

Yannick Alléno
Yannick Alléno est familier de ce légume avec son “Brochet brioché, extrait de céleri“, le “Canard, tarte feuilletée pommes-cannelle au foie gras, céleri en croûte de foin“, la “Noix de saint Jacques à cru, transparence de soja, céleri et citron caviar“, l'”Avocat resté sur l’arbre 18 mois en mille-feuille de céleri, extraction coco aux éclats de chia“

Eric Frechon
Il en va de même pour Eric Frechon et son “Pâté en croûte de gibiers à plumes et rémoulade de céleri au raifort“, le “Céleri-Rave Monarch rôti à la broche, oignon paille, truffe noire et lard fumé, rémoulade de céleri aux noix et râpé de truffe noire” ou encore la “Soupe de topinambour, écume de café, crumble céleri cacao“.

Bernard Stamm
Je vous propose pour terminer les ravioles de Bernard Stamm dans son domaine alsacien d’Obernai (https://www.lafourchettedesducs.com/)
Il vous faut :
2 carottes
¼ de céleri rave
persil et coriandre
16 feuilles de raviole
120g de foie de canard frais
1 jaune d’œuf
2l de bouillon de bœuf
sel et poivre du moulin
Épluchez et lavez les carottes ainsi que le céleri et détaillez-les en brunoise. Cuisez la brunoise « à l’anglaise » dans 50cl d’eau bouillante salée, encore croquante. Hachez le persil et la coriandre. Réservez au frais.
Coupez le foie gras en cubes d’environ 1 cm de côté (environ 15 g). Disposez 8 feuilles de raviole, placez un cube de foie de canard frais au centre de la feuille. Salez et poivrez et fermez les ravioles avec les 8 autres feuilles en les badigeonnant de jaune d’œuf à l’aide d’un pinceau. Pochez les ravioles 5 min dans de l’eau bouillante salée.
Disposez les ravioles dans une assiette creuse ainsi que la brunoise de carotte et de céleri, nappez de consommé de bœuf bouillant et agrémentez de persil et de coriandre hachés.