Noir c’est noir ?

Je ne voudrais pas me mettre à dos les très nombreux fans de Johnny, mais je pense que les paroles de la chanson “Noir c’est noir” empruntée en 1966 au groupe espagnol “Los Bravos” ne reflètent pas nécessairement la réalité.

Noir c’est noir
Il n’y a plus d’espoir
Oui gris c’est gris
Et c’est fini, oh, oh, oh, oh
Ça me rend fou j’ai cru à ton amour.

D’ailleurs, à la fin des 3’12 de ce “hit” éternel les choses semblent susceptibles de s’arranger

Noir c’est noir

Il me reste l’espoir

Je préfère pour ma part les propos du peintre Pierre Soulages, mort à 102 ans en octobre 2022. Cet immense artiste avait compris après la deuxième guerre mondiale la nécessité  de “réinventer la peinture” avec de nouveaux outils et de nouveaux matériaux.

” J’ai d’abord employé le noir pour sa capacité à illuminer les couleurs sombres. C’était, au fond, une manière de créer de la lumière par le contraste. À partir de 1979, j’ai recouvert totalement ma toile avec la même couleur noire. Ce n’était plus le noir qui comptait alors, c’était le reflet par les différents états de surface du noir : quand il était strié, cela dynamisait la surface, lorsqu’il était lisse, c’était une surface calme qui réfléchissait la lumière différemment. Il y avait toute une série de possibilités. Mais à ce moment-là, je ne travaillais plus réellement avec le noir, je travaillais avec la lumière ; pas n’importe quelle lumière : celle réfléchie par les états de surface de la couleur noire. Réfléchie, transformée et, j’ai envie de dire, transmutée. »

Une des peintures monumentales au noir de bitume exposées au musée Soulages (Rodez)

Le noir fait vibrer la lumière et les couleurs, en peinture comme en cuisine !

Voici une petite revue très subjective et non exhaustive de recettes qui portent le noir en cuisine. Et ce n’est pas triste !

Tiens, du boudin !

On tient peut-être là un des plus anciens trésors de notre paradis charcutier. Aphtonite, un cuistot de la Grèce antique aurait créé cette recette en faisant cailler du sang dans des boyaux, accommodé selon les goûts avec des épices, des lardons, du riz, des morceaux de gras, des pommes ou des raisins secs… Depuis, on la retrouve un peu partout dans les tavernes, y compris en Amérique latine, dans la sphère russophone, en Espagne, dans le “breakfast” anglais…

Le boudin blanc date, lui, du Moyen Age et contient du lait, de la fécule, de la mie de pain et de la viande blanche (poulet ou volaille essentiellement) ainsi que différents arômes (truffes, porto, marrons…)

Une tuile au charbon ou à l’encre

Vous voulez étonner vos convives en légèreté et à moindre prix ? Rien de tel qu’une tuile, sucrée ou salée qui donnera du volume à une assiette et attirera le convive qui cassera la tuile, pour découvrir ce qu’elle cache…

L’ordre du jour étant au noir, concentrons-nous sur les tuiles plutôt salées, au charbon ou à l’encre.

Pour fabriquer du charbon actif, on carbonise du bois ou une matière organique végétale en la faisant chauffer à sec dans un récipient jusqu’à éliminer toute humidité. Remplissez une grande casserole de morceaux de bois dur et posez un couvercle léger dessus. Mettez-la sur le feu pendant 3 à 6 heures.

Les éléments calcinés, en se volatilisant, créent des alvéoles dans le carbone.

Le chêne, le bouleau, le peuplier, le hêtre, le pin, le saule ou encore le tilleul fournissent un bois propice au charbon actif. Il peut aussi être issu de bambou, d’écorce de noix de coco, de noyaux d’olives, de coques de cacahuète ….

Il vaut mieux éviter en revanche les charbons utilisés dans l’industrie obtenus à partir de résidus pétroliers… .

Le charbon végétal a des quantités d’applications, notamment pour purifier l’air, l’eau ou le corps. Il est depuis longtemps entré dans la composition des filtres de masques à gaz. Les Egyptiens utilisent depuis toujours le charbon végétal comme désodorisant, pour soigner les problèmes intestinaux mais aussi pour purifier l’eau.

L’encre de seiche, aussi appelée sépia, est un liquide riche en mélanine présent dans la poche de la seiche que cette dernière éjecte pour se protéger et s’extraire de situations délicates.

Lançons-nous dans la fabrication de quelques tuiles qui agrémenteront par exemple un poisson blanc avec une garniture colorée (poivrons, tomates…) ou pour valoriser une pièce de volaille, un fromage, un apéritif avec des olives…

Il vous faut :

160 g d’eau

60 g d’huile

20 g de farine type 55

Du charbon végétal ou de l’encre de seiche

Réunissez l’eau froide, l’huile et la farine et mixez. Ajoutez le colorant et mixer à nouveau. Chauffez une petite poêle anti-adhésive légèrement graissée. Versez comme pour une crêpe, une petite quantité d’appareil dans la poêle chaude. Laissez bouillir jusqu’à évaporation de l’eau. Continuez la cuisson jusqu’à atteindre la rigidité de la tuile. La tuile se détache facilement une fois cuite. Débarrassez sur un papier absorbant.

Avec cette tuile anthracite, vous donnerez du “peps” à une pièce de volaille, un fromage, un apéritif avec des olives…

Des pommes de terre à l’ail noir

L’ail noir est un ail bruni à basse température (60 à 80 °C) dans une enceinte humide (70 à 90 %) durant 2 à 3 semaines, prenant une texture similaire à celle d’un pruneau d’Agen, utilisé en cuisine asiatique, notamment en Corée.

Pour impressionner votre entourage, précisez que ce brunissement non enzymatique est une conséquence de la réaction de Maillard qui survient pendant la cuisson des aliments. Elle est en partie responsable du brunissement et du déploiement des arômes.  À 90°C, la réaction de Maillard se produit lentement. Pour augmenter sa vitesse, il faut que la surface de l’aliment dépasse le point d’ébullition de l’eau (100°C). L’ail cru a une odeur tenace et peut être mal digéré. L’ail noir a un goût qui rappelle le vinaigre balsamique, la réglisse et de douces saveurs sucrées et acidulées. Mais, à partir de 180°C, la réaction de Maillard laisse la place à la “pyrolyse”. On entre alors dans le chapitre des “ratages” et des plats carbonisés…

Originaire de Nancy, Frédéric Anton, un des Meilleurs Ouvriers de France (MOF) est aux pianos du luxissime Pré Catelan dans le Bois de Boulogne à Paris, depuis 1997. En 2007, il y décroche la prestigieuse troisième étoile.  En 2018, en compagnie de Thierry Marx, il rafle à Alain Ducasse la gestion des restaurants de la Tour Eiffel.

Sur Alain Ducasse et les batailles au sommet de la grande gastronomie française, voir https://recettesahistoires.com/2022/07/11/colbert-eiffel-et-de-gros-poissons/

Voici sa version simplissime et particulièrement goûteuse de ses pommes de terre à l’ail noir

1,2 kg de pommes de terre charlotte

quelques brins de thym citron

150 g de beurre demi-sel

1 tête d’ail noir

un peu de fleur de sel

du poivre concassé

Pelez et lavez les pommes de terre. Cuisez-les à la vapeur avec quelques brins de thym citron pendant 35 minutes. Égouttez-les et mettez-les entre deux torchons. Aplatissez-les délicatement avec la paume de la main pour qu’elles éclatent légèrement.

Préparez un beurre noisette, faites-y colorer les pommes de terre de chaque côté, puis ajoutez l’ail noir en chemise et le reste du thym. Arrosez avec le beurre de la cuisson. Dressez les pommes de terre et parsemez de fleur de sel et de poivre concassé. Servez aussitôt.

Radis noir, le top du détox

D’octobre à janvier, vous trouvez sur les étals des cylindres pas forcément très engageants mais pourtant pleins de ressources. Le radis noir, alias le radis d’Espagne, alias le raifort parisien favorise la digestion, draine le foie, augmente la sécrétion de bile et facilite l’élimination des toxines accumulée par exemple durant la trêve des confiseurs…

Il n’est pas forcément nécessaire de faire très compliqué pour se faire plaisir : une tranche de radis noir translucide sur une tartine beurrée : un peu de piquant, du gras, le croquant de la chair (on laisse la peau noire pour l’esthétique), la douceur de la mie. Sacré programme avec si peu de choses !

Il est possible de décupler ces sensations, par exemple  avec quelques copeaux de betterave rouge crue, des pousses d’épinards, quelques clémentines dont on aura prélevé un peu de zeste (la saison a lieu de novembre à février) et des noix de Saint-Jacques (saison d’octobre à avril) riches en protéines, pauvres en graisse, particulièrement abondantes depuis que la profession en a réglementé la récolte. Vous pouvez les utiliser crues finement tranchées en carpaccio, ou entières passées au beurre (45 secondes maxi de chaque côté).

Les couleurs de la forêt noire

Le costume traditionnel des habitants de la Forêt-Noire se compose de noir, de rouge et de blanc, couleurs que l’on retrouve dans le gâteau imaginé en 1915 à Bad Godesberg par un jeune pâtissier, Josef Keller, qui propose un biscuit à la noisette imbibé de kirsch, tartiné de confiture à la cerise noire. Incorporé dans un bataillon d’infanterie, il doit mettre de côté sa recette, jusqu’en 1919 où il ouvre une pâtisserie sur les bords du lac de Constance.

Josef Keller

La formule est semble t-il améliorée en 1930 par Erwin Hildenbrand, pâtissier à Tübingen, qui remplace le biscuit aux noisettes par une gênoise au chocolat et le surmonte de crème au beurre fourrée de cerises et de crème chantilly puis de copeaux de chocolat.

1930 est une date importante dans l’histoire de la cuisine et de la pâtisserie puisqu’à cette époque apparaissent les premiers réfrigérateurs domestiques. Il devient donc possible de fabriquer et de conserver quelques jours ces constructions fragiles. Cela correspond à l’essor des gâteaux à la crème. Et la Schwarzwälder Kirschtorte connaît un essor fulgurant.

Des couches et des feuilles

Les cuisiniers sont des démocrates, je vous assure ! Enfin, beaucoup d’entre eux… La preuve : ils aiment le partage et l’alternance.

Explication : dans l’histoire de la gastronomie, les successions de goûts contradictoires dans une seule bouchée sont souvent des sources de nouveauté et de curiosité. On n’est pas très loin d’un cours de sciences politiques !

Le feuilletage

La première alternance, c’est à n’en pas douter la pâte feuilletée.

Claude Gellée dit Le Lorrain (Champagne 1600, Rome 1682)

Pour les besoins de cette chronique, même s’il existe des précédents en France, en Espagne et chez nos voisins arabes, on attribuera, quitte à s’attirer les foudres de quelques exégètes, au peintre Claude Gellée dit Le Lorrain l’invention de ce divin feuilletage, au mitan du XVIIe siècle.

Parce que le peintre était bien boulanger. A Chamagne, dans les Vosges, il n’était pas le plus brillant  dans l’apprentissage de l’écriture. Ses parents décident de le mettre en apprentissage auprès du pâtissier du village.

C’est là qu’il aurait eu l’idée de rouler de la pâte à pain dans du beurre pour son père malade. Il avait créé le croissant ! Orphelin à douze ans, il suit à quatorze ans une troupe de pâtissiers vers Rome où il trouve du travail comme cuisinier auprès du peintre Agostino Tassi.

Le Lorrain Matin dans le port, Musée de l’Hermitage Saint-Petersbourg

Le peintre découvre les talents de son cuisinier et l’initie à l’art pictural et à la gravure, dans lesquels il excelle très vite. Il accomplira une bonne partie de sa carrière en Italie. A plusieurs reprises le peintre-boulanger s’est demandé s’il ne valait pas mieux retourner au fournil plutôt que de vivre difficilement de son art.

Antonin Carême

Bien entendu la technique du feuilletage s’est perfectionnée depuis, notamment par l’entremise de l’inévitable Antonin Carême. Voir https://recettesahistoires.com/2022/06/30/du-marquis-de-bechameil-a-la-crete-de-coq/ et https://recettesahistoires.com/2022/10/12/la-suave-douceur-de-la-gelee/

Pour fabriquer une pâte feuilletée, il vous faut de la farine, du sel, de l’eau et une matière grasse. Vous commencez par pétrir longuement le mélange farine-sel-eau. Après une phase de repos, vous laminez la pâte obtenue au rouleau en plusieurs étapes pour éviter que la pâte ne se déchire et obtenir une “abaisse”. C’est ce qu’on appelle la “détrempe”, sur laquelle vous étalez une épaisseur équivalente de beurre ou de matière grasse.

Intervient alors le “tourage” : vous repliez la pâte en trois parties égales puis les repliez sur elles-mêmes. Vous avez donc obtenu six couches alternées de pâte et de beurre superposées lors de ce premier tourage. Vous mettez cette nouvelle “abaisse” au froid.

Après cette première phase, vous sortez l’abaisse du réfrigérateur, vous la laissez revenir à température et vous faites un nouveau “tourage”. Vous allez renouveler l’opération six fois de suite. Les forts en maths pourront calculer qu’on obtient au bout du compte 729 couches empilées de beurre et 730 feuilles de pâte !

Vous comprenez alors pourquoi on demande le plus souvent à des professionnels de fabriquer le feuilletage ! Ils ont le savoir-faire et le matériel ad-hoc. En revanche ils ont eux aussi besoin de temps pour réaliser ces six “tourages”. Préférez quoi qu’il en soit les feuilletages au beurre, plutôt qu’aux graisses exotiques.

A la cuisson, la chaleur du four va provoquer l’évaporation de l’eau et le gonflement des feuillets et vous obtenez à la fois le moelleux et la légèreté de cette pâte miraculeuse.

Si on ajoute de la levure et des œufs à l’abaisse, avant d’étaler la couche de beurre, la pâte gonfle bien sûr beaucoup plus. C’est la technique utilisée pour fabriquer les croissants et autres viennoiseries notamment. Le mot “viennoiserie” vient du “kipferl”, petit pain en forme de croissant importé d’Europe centrale à Paris par un officier autrichien. Celui-ci ouvrit une “boulangerie viennoise” en 1837 au 92, rue de Richelieu (2e arrondissement). La boulangerie a malheureusement disparu récemment. C’est ce qui marque véritablement l’avènement de ces gourmandises du petit-déjeuner.

Feuilletage inversé

Pierre Hermé

Plus récemment, sous la férule de Pierre Hermé s’est ajoutée la technique du feuilletage inversé (https://recettesahistoires.com/2022/06/19/un-amour-de-pavlova/).

Il s’agit d’ajouter de la farine au beurre de tourage. Cette technique est un peu plus rapide. La pâte gonfle plus à la cuisson et donne un feuilletage encore plus croustillant et fondant à la fois. En revanche on ne le trouve pas tout prêt dans le commerce.

Mini-bouchées aux escargots

Il existe évidemment des myriades de recettes à base de feuilletage tout autour de notre Hexagone. J’en choisis d’abord une pleine de senteurs et d’histoires de la campagne, en Bourgogne.

Vous êtes équipé d’un bâton de noisetier souple et résistant prélevé dans une haie avec votre canif. Eventuellement vous avez gravé sur celui-ci quelques signes cabalistiques censés porter chance. Vous devez commencer par battre les bords d’un petit chemin départemental, muni d’un panier, un soir d’été après une pluie. Vous êtes à la recherche des débonnaires escargots originaires de cette région gourmande.

La rumeur prétend que le premier gastéropode se fait toujours attendre. Une fois celui-ci prélevé, vous êtes sur un “filon”, restez-y, qu’il pleuve ou qu’il vente. Il vous en faudra deux douzaines.

De retour au foyer, vous allez installer cette petite troupe gluante dans un enclos sans terre ni herbe, plutôt à l’abri de la lumière, dans lequel vous aurez installé force thym fraîchement coupé. Vous oubliez ce parquage pendant quelques jours. Vous allez ensuite nourrir le troupeau avec un peu de farine pendant une bonne nuit. Vous êtes alors prêt à passer les bêtes au court-bouillon (avec oignons, clous de girofle, carottes, céleri etc…). Puis à les décoquiller élégamment avant de les conserver au frais.

Vous avez préparé 150 g de feuilletage, inversé ou traditionnel c’est vous qui voyez, mais sans œuf et sans levure. Avec un emporte-pièce cannelé de 5 cm vous découpez 48 disques que vous abaissez à 3 mm.

Avec un autre emporte-pièce cannelé de 3 cm, vous évidez le centre de 24 disques de façon à former des anneaux. Vous dorez les disques de pâte au jaune d’œuf battu, vous disposez les anneaux sur chacun d’eux et vous les dorez également sans faire de coulure.

Vous enfournez ces petites bouchées à 180°C jusqu’à ce qu’elles soient saisies mais pas trop colorées. Vous laissez refroidir et retirez délicatement les couvercles qui ont dû se former au centre avec la pointe d’un couteau.

Vous installez un escargot bien égoutté dans chaque bouchée et vous allez confectionner un “beurre d’escargot” avec 200 g de beurre mou, un bouquet de persil plat mélangé avec 4 gousses d’ail, 2 échalotes, le tout finement haché, du sel et du poivre. Si vous êtes équipé, vous mettez ce beurre manié en poche et en garnissez chaque bouchée. Si vous n’avez pas de poche, vous en prévoyez pour une prochaine fois et utilisez une petite cuillère… Vous enfournerez de nouveau ces bouchées garnies à 150°C pendant une dizaine de minutes, juste avant de servir au moment de l’apéritif.

Le Crespou provençal

De Bourgogne, descendons par la route nationale 7 vers la vallée du Rhône et la ville d’Avignon, pour y découvrir le “crespou” qu’on préparait pour rassasier les moissonneurs.

Il vous faudra

14 œufs

3 poivrons vert, jaune et rouge

1 poignée d’herbes vertes

30 g de pignons

2 oignons frais

1 cuillère à soupe de tapenade noire

50 cl de sauce tomate que vous aurez fabriquée en chauffant doucement des tomates entières pendant suffisamment de temps pour qu’elles éliminent une bonne part de leur eau de végétation et concentrent les goûts.

De l’huile d’olive, du sel et du poivre

Lavez les poivrons et enfournez-les sous le gril jusqu’à ce que la peau se fendille. Placez-les dans un saladier et fermez hermétiquement. Laissez reposer 10 minutes, puis pelez les poivrons et épépinez-les. Détaillez-les en grosses lanières et réservez-les par couleur.

Lavez, essorez et ciselez finement les herbes. Faites dorer les pignons avec les oignons ciselés dans un peu d’huile d’olive.

Dans une petite poêle, versez 1 cuillère à soupe d’huile d’olive et placez le poivron rouge. Laissez chauffer 1 minute. Cassez 2 œufs dans un bol, salez et poivrez, puis versez-les sur les poivrons. Cassez un peu l’omelette avec une spatule pour assurer une cuisson homogène et laissez cuire. Retournez-la et laissez-la cuire encore un peu. Elle doit être souple mais pas baveuse. Déposez l’omelette dans un petit saladier concave.

Fouettez 2 œufs avec la tapenade. Faites cuire dans la poêle huilée de la même façon et déposez sur la première omelette. Recommencez successivement avec le poivron vert, les herbes, les pignons, le poivron jaune et la tomate. Posez une assiette sur les omelettes et ajoutez un poids au-dessus. Laissez prendre ainsi une nuit au frais.

Le lendemain, égouttez le jus rendu et démoulez. Servez frais mais pas froid avec le reste de sauce tomate.

Le pastis gascon

Dans le Gers et en Ariège, on prépare un gâteau feuilleté aux pommes et aux pruneaux recouvert d’un voile de pâte croustillant et caramélisé. Les cuisinières étalaient une pâte extra-fine (1/10e de millimètres) étirée sur un drap étendu sur une grande table. Le pastis s’appelait donc aussi l'”estirat”. On étalait dans un moule à tarte une couche de cette pâte bien graissée à la graisse d’oie, suivie d’une fine couche de pommes en fines lamelles mélangées avec une compote de pruneaux à l’armagnac. On terminait par  une rosace de cet “estirat” à nouveau bien graissée avant d’enfourner.

De nos jours on utilise de préférence des feuilles de pâte à filo venue de la pâtisserie orientale, qu’on retrouve par exemple dans les succulents baklavas. On a perdu la belle image des cuisinières affairées autour de cette grande table, mais le plaisir est comparable.

Le gâteau aux Thé Brun

Du Gers, nous remontons enfin vers Nantes et les inaltérables biscuits Brun. Désolé de verser dans la pub à peine déguisée, mais de mémoire de grand’mère, il n’existe pas d’équivalent pour réussir cette ultime démonstration d’empilement en alternance, particulièrement bienvenue au moment des fêtes ou des anniversaires.

Vous préparez quelques grandes tasses de café plutôt serré que vous versez dans un plat. Il n’est pas interdit d’ajouter un petit chouia de rhum. Vous trempez quelques secondes les biscuits dans ce breuvage et réalisez un premier tapis rectangulaire de 6 à 8 biscuits ou plus.

Vous allez étalez une couche de ganache froide au chocolat réalisée avec du chocolat noir de qualité, un peu de lait et du beurre.

Vous allez recommencer l’opération jusqu’à obtenir un parallélépipède d’une bonne dizaine de centimètres de hauteur ou un peu plus si affinités.

Vous terminez par une généreuse couche de ganache bien brillante et laissez reposer au froid pendant au moins 24 heures. Vous pourrez ensuite décorer cette œuvre à votre convenance : fruits secs, fruits confits, épluchures de chocolat, bougies…

Pomme de terre : des variétés et des recettes

Le “pauvre” Parmentier n’a pas fini de se retourner dans sa sépulture du Père Lachaise !

Mon cher Antoine que de crimes de lèse-gourmandise commet-on en ton nom ! Toi qui voulais contribuer au recul de la famine et de la misère, imaginais-tu que de Namur à Barbès en passant par Hong Kong et Chicago, siège social de la plus grande chaîne de restauration rapide au monde dont le nom débute par “Mc” et se termine par “d’s”, on créerait des générations d’obèses et de gamins ventripotents, gavés à la délicieuse frite dont tu vantais les mérites !

La “patate” a conquis le monde, en tête devant les spaghettis, le couscous, les pizzas et les sushis. Mais comme c’est l’usage dans ces lignes, privilégions la vertu face au vice et mettons en évidence la gourmandise et l’excellence plutôt que les ballonnements et autres troubles gastriques !

La pomme de terre a déjà été deux fois au centre de nos divagations (https://recettesahistoires.com/2022/07/02/ernest-le-pont-neuf-et-les-frites/ et https://recettesahistoires.com/2022/08/16/parmentier-le-vrp-de-la-patate/ ). Vous constaterez ci-dessous qu’il y a encore matière …

Les jardiniers et surtout les chercheurs en biologie n’ont cessé depuis Parmentier et peut-être même avant de déployer des trésors d’inventivité pour “inventer” de nouvelles variétés de pommes de terre. Elles se comptent par milliers et je me contenterai de n’en citer que quelques unes, faciles à trouver dans les jardins et les rayons.

La frite et la bintje

A tout seigneur, tout honneur : commençons par la valeureuse Bintje (diminutif de Benedikt en néerlandais) qui continue de prospérer en Belgique et dans les plaines de Flandres et d’Artois. Elle fait toujours le bonheur des clients des “baraques à frites” des faubourgs qui privilégient bien entendu les tubercules fraîchement épluchés, lavés et taillés aux “ersatz” surgelés.

La bintje a été créée aux Pays-Bas au début du XXe siècle. Elle fut longtemps la plus cultivée en Europe et demeure la reine en France. En Belgique, elle a longtemps dominé le marché avant de chuter fortement. C’est une variété dite “farineuse”, qualité recherchée pour la belle couleur dorée qu’elle prendra dans la graisse chaude. Et son calibre permet de confectionner des bâtonnets qu’on peut saisir à la main. Il se raconte du côté de Namur et de Dinant, que les pêcheurs passaient à la friture le “menu fretin” qu’ils trouvaient au fond de leurs filets. Quand la Meuse gelait, ils découpaient les pommes de terre en formes de petits poissons et les passaient également à la friture. Ces légendes alimentent depuis fort longtemps les polémiques historiques entre la Meuse et le Pont-Neuf (https://recettesahistoires.com/2022/07/02/ernest-le-pont-neuf-et-les-frites/) au centre desquelles je me contenterai d’être “ni pour ni contre, bien au contraire”.

Gustativement, les meilleures frites sont incontestablement celles passées à la graisse animale : porc en Bretagne, bœuf en Belgique. Moins intéressantes pour le goût, mais moins chères et moins riches en mauvais cholestérol et en acides gras saturés, les huiles végétales l’emportent pourtant. L’huile d’arachide résiste particulièrement bien aux températures élevées. L’huile végétale peut être réutilisée une quinzaine de fois, l’huile animale une dizaine de fois seulement. Dans tous les cas, un premier bain à 130°C suivi d’un deuxième à 180°C au moment de servir s’impose.

L’Agria “soufflée”

Agria est une variété récente, issue d’un croisement entre Quarta et Semio en Allemagne, en 1985. Le tubercule est farineux,  sa chair de couleur jaune convient bien en friture. C’est donc une concurrente de la Bintje.

Pelez les pommes de terre, lavez-les puis essuyez-les. Détaillez-les en lamelles de 3 mm d’épaisseur avec une mandoline. Taillez ensuite des formes régulières avec un emporte pièce. Essuyez-les soigneusement.

Chauffez un premier bain de friture à 130 °C. Plongez-y les pommes de terre en mélangeant constamment l’huile avec une louche. Lorsque les lamelles remontent à la surface, sortez-les à l’écumoire et laissez refroidir 30 secondes.

Vous avez préparé un deuxième bain à 180 °C. Plongez-y immédiatement les pommes de terre en mélangeant toujours. Lorsque les pommes sont soufflées et dorées, retirez-les et déposez-les sur une feuille de papier absorbant.

Salez, poivrez et dégustez. Les pommes soufflées sont un peu plus complexes que les frites à réaliser mais sont très esthétiques aux côtés de légumes colorés et d’une pièce de viande ou de poisson blanc par exemple.

Le truffiat du Berry

A Bourges et dans tout le centre de l’Hexagone, on appelle les pommes de terre des “treuffes”. Le truffiat est une tourte à base de pommes de terre, pourquoi pas des Belles de Fontenay originaires du Loiret, variété dite “à chair ferme”, de la crème fraîche, des fines herbes et de l’oignon… du Berry.

Etalez un premier rond de pâte feuilletée dans un moule à tarte. Piquez-le à la fourchette.

Mandoline

Pelez les pommes de terre (1 kg) et taillez-les en rondelles fines à la mandoline. Coupez 2 oignons jaunes en rondelles et ciselez un bouquet de persil plat. Disposez une couche de pommes de terre, puis des oignons, des herbes puis recouvrez de crème fraîche épaisse, salez, poivrez. Répétez l’opération jusqu’à ce que le niveau de pommes de terre dépasse le haut du moule.

Etalez la seconde pâte feuilletée sur les couches de pommes de terre. Scellez les bords en repliant la pâte du dessous sur la pâte du dessus puis finalisez en faisant des stries avec une fourchette sur le pourtour de la tarte.

Mélangez dans un bol un jaune d’œuf et un fond d’eau puis badigeonnez la tourte du mélange sans oublier les bords.

Faites un petit trou puis insérez une cheminée pour que la vapeur de cuisson puisse s’échapper. Enfournez pendant 50mn à 180°C. Surveillez la cuisson des pommes de terre en plantant un couteau. Certains font mariner les pommes de terre avec de l’ail et du sel, d’autres ajoutent la crème fraîche après cuisson en découpant le couvercle. Mais une bonne salade (à l’huile de noix par exemple) suffira pour accompagner cette substantielle tourte.

L’aligot de l’Aubrac

L’aligot est une purée de pommes de terre (des Blanche farineuses à souhait qui se conservent bien pour l’hiver par exemple) enrichie en tome fraîche (un caillé de lait de vache pressé une fois à ne pas confondre avec les tommes d’Auvergne ou d’ailleurs) et d’ail.

L’aligot nécessite une bonne poigne pour mélanger sur le feu cette purée un peu collante qui doit devenir légèrement élastique au moment de servir. C’est roboratif à souhait, on l’accompagne d’une salade légère et traditionnellement d’une saucisse fraîche. L’aligot donne lieu à toutes sortes de réjouissances légèrement alcoolisées, en plein air durant l’été, près de l’âtre, l’hiver venu…

Le gratin du Dauphiné

Ne soyez pas abusé par les usurpateurs qui ajoutent force œufs et fromage dans ce gratin traditionnel composé de pommes de terre (des Charlotte bien fermes par exemple) et de lait.

Jules Charles Henri de Clermont-Tonnerre

Nuance de taille : au XVIIIe siècle, quand apparaît ce gratin au menu d’un dîner offert aux officiers municipaux de la ville de Gap dans le Dauphiné, par le duc Jules Charles Henri de Clermont-Tonnerre, lieutenant général du Dauphiné, on ne connaissait pas le lait écrémé. Il ne vous est donc pas interdit d’ajouter de la crème fraîche bien épaisse. En revanche, ne lavez pas les pommes de terre qui doivent conserver leur amidon qui permettra la liaison avec le lait crémé. Cuisez lentement ce gratin au four pour favoriser l’absorption de la crème par les pommes de terre.

On vous fait une confidence, mais ne le répétez pas : dans les hauteurs du Vercors, on utilise de vieux restes de fromage en surface pour faire gratiner le tout. Et puisqu’on se dit tout, il semble qu’à Gap, le gratin avait été servi avec des ortolans…

Les pommes du Dauphin

Le dauphin c’est l’héritier présomptif de la couronne de France, mais en l’occurrence on désigne souvent ainsi Louis-Antoine d’Artois, prétendant à la Couronne de France et reconnu comme roi par les légitimistes sous le nom de Louis XIX né à Versailles en 1775, mort à Goritz (ville autrichienne à l’époque, aujourd’hui italienne) en 1844.

Les pommes dauphine sont constituées d’une purée de pommes de terre (une Désirée plutôt farineuse par exemple) assaisonnée de noix de muscade. Et d’un tiers de son volume de pâte à choux. Prélevez des noix de préparation, farinez-les avant de les frire dans l’huile.

Les pommes duchesse, quant à elles sont une purée mélangée avec des œufs qu’on forme à l’aide d’une poche munie d’une douille cannelée, puis qu’on passe au four pendant quelques minutes.

Les pommes noisette sont des pommes de terre écrasées à la fourchette et formées avec une cuillère à pomme parisienne.

La purée de Joël

Joël Robuchon

Joël Robuchon, l’empereur des fourneaux aux 36 étoiles avait sans doute pris beaucoup de soin mais surtout un incommensurable plaisir à revisiter la purée de notre enfance. C’était la signature de Joël, et comme c’est le cas des artistes, l’homme n’est plus là, mais ses créations demeurent.

Joël privilégiait la ratte pour confectionner “sa” purée. C’était sans doute de sa part un pied de nez à la logique. Mais il nous avait habitué à de telles acrobaties. La ratte est une variété qui a tout contre elle : faible résistance aux maladies, faible rendement, conservation très moyenne, et surtout chair délicieuse certes, mais ferme, ce qui n’est pas la qualité recherchée pour obtenir une purée fondante.

Les rattes (1 kg) sont cuites à couvert dans une eau froide salée au départ pendant une trentaine de minutes.

Pendant ce temps, coupez le beurre en petits dés (250 g de beurre non salé). Réservez au froid.

Pelez les pommes de terre chaudes et passez-les au moulin à légumes à grille très fine.

Chauffez 25 cl de lait sans le laisser bouillir.

Desséchez la purée obtenue à feu doux avec une spatule en bois. Ajoutez le beurre et remuez pour obtenir une purée très lisse. Salez. Ajoutez doucement dans le mélange le lait chaud en remuant avec un fouet jusqu’à ce que la purée coule du fouet.

Poivrez et servez. 

Fruit confit, le soleil de l’hiver…

Nous avons voulu danser et chanter tout l’été,

La bise et les frimas sont maint’nant revenus,

De beaux fruits acides, goûteux et chamarrés

à ce triste instant nous voilà bien dépourvus.

Il y a heureusement belle lurette que notre instinct de cigale a réussi à contourner l’hiver. Grâce au savoir-faire et aux ressources des confiseurs qui, depuis le XVe siècle, enrobent savamment les fruits de l’été. Par osmoses successives, ils remplacent l’eau par du sucre pour assurer leur conservation.

Michel de Nostredame, dit Nostradamus,

Saint-Rémy de Provence 1503, Salon de Provence 1566

En 1555, Michel de Nostradamus publie à Salon de Provence le “Traité des fardements et confitures“, quelques années après avoir publié son premier “almanach” et les prédictions qui le rendront célèbres dans le public et auprès des puissants. Nostradamus enseigne comment « confire petits limons et oranges tout entiers, coings en quartiers avec le sucre pour faire du cotignac, du pignolat, du sucre candi, des sirops, des poires confites et de la tarte de massapan ».

Nostradamus n’est pas l’inventeur du fruit confit mais il vit au cœur du triangle Salon de Provence, Saint-Rémy de Provence et Apt. C’est le point névralgique de la production nationale des fruits que nous retrouvons sur nos tables.

Apt est incontestablement la capitale mondiale du fruit confit et c’est dans cette région que sont installés les meilleurs artisans confiseurs.

Il faut au bas mot trois mois pour obtenir de beaux fruits luisants. Ils vont baigner dans huit bains de sirop de sucre de plus en plus concentré et autant de séchages à l’air libre. Les fruits sont ensuite séchés à four très doux (50°C). Puis le confiseur les “oublie” dans un fruitier pendant au moins deux mois. Enfin, il les “glace” au sucre  une dernière fois avant que nous puissions les déguster.

Méfions-nous, il existe sur le marché de prétendus fruits confits fabriqués à base de … navets, artificiellement colorés et parfumés pour ressembler à des écorces confites. Pour l’occasion, ils sont baptisés “raves”. Ce n’est pas nocif, mais c’est pour le moins trompeur !

C’est un peu dommage pour les navets qui méritent un meilleur sort. Il existe d’ailleurs des recettes délicieuses à base de navets confits, pour accompagner par exemple du canard.

Les treize desserts

Puisque nous sommes en Provence, restons-y, avec la tradition des treize desserts de Noël. Ce chiffre fait référence à la Cène, dernier repas des 12 apôtres avec le Christ avant sa crucifixion.

Les treize desserts sont servis à la fin du repas la veille de Noël, puis restent sur la table pendant trois jours. Les invités doivent goûter à tous les desserts par politesse envers leur hôte.

En voici une liste indicative mais non exhaustive :

Quatre fruits secs qui représentent les 4 ordres religieux ; noix ou noisettes (les Augustins) ; figues sèches (les Franciscains) ; raisins secs (les Dominicains) ; amandes (les Carmélites)

La pompe à l’huile d’olive ou fougasse d’Arles,  galette  parfumée à l’eau de fleur d’oranger et au zeste de citron ou d’orange.

Le nougat blanc

Les dattes

Le nougat noir, avec du miel fondu cuit et des amandes

Le nougat rouge, à la rose et aux pistaches

Les calissons d’Aix, en forme de navette, fourrés avec un mélange de melon confit et d’amande nappé de glaçage royal (blanc d’œuf et sucre glace), posé sur un fond de pain azyme.

Des oranges ou des clémentines

De la pastèque

Des fruits confits entiers (cédrat, poire, ananas…) ou des pâtes de fruits….

Le panettone italien

De la Provence, filons vers la “Botte” et la région milanaise.

Ludovico il Moro Sforza dit le More,

1452 à Vigevano (Italie), 1508 à Loches (France)

On raconte que dans les années 1480 le cuisinier de Ludovico il Moro Sforza, duc de Milan, chargé de préparer le dîner de Noël, avait oublié son dessert au four. Stupeur dans la cuisine jusqu’à ce que Toni, jeune commis, propose une solution : «  Avec ce qui restait dans le garde-manger – un peu de farine, du beurre, des œufs, de l’écorce de cédrat et quelques raisins – j’ai cuisiné ce matin ce dessert. Si vous n’avez rien d’autre, vous pouvez le mettre sur la table ». Le cuisinier y consentit et, tremblant, se cacha derrière un rideau pour espionner la réaction des invités. Tous furent enthousiastes et au duc qui voulait savoir le nom de cette délicatesse, le cuisinier révéla le secret : « c’est le pain de Toni (l’è ‘l pan del Toni) ». Depuis, il est appelé « pane di Toni », le « panettone »

Au XXe siècle, la recette évolue avec Angelo Motta qui fait lever la pâte trois fois pendant vingt heures avant de la cuire, ce qui lui donne sa légèreté en même temps qu’il en industrialise la fabrication. Après la deuxième guerre mondiale, le panettone est devenu “le” dessert de Noël italien.

Angelo Motta,

1890, à Gessate, Italie, 1957 à Milan, Italie

Les boulangers italiens partent d’un morceau de pâte de levain naturel prélevé sur une préparation antérieure et qui sert de greffe microbienne, auquel on ajoute de la farine de blé dur et de l’eau. Cette pâte subit un premier pétrissage, ce qui arrête la fermentation. Le pâton est mis à lever à température ambiante, avant deux autres phases de pétrissage et de “levage”. C’est à ce moment qu’on ajoute 20 % en poids de raisins sultanines, d’écorce d’orange ou de cédrat confit  et au moins 10 % en poids de beurre.

Le “pasticcere” (le pâtissier) procède alors au façonnage : la spezzatura, la pâte finale levée est divisée en portions, la pirlatura, les pâtons sont façonnés en boules, la pose des pirottini, la pâte est mise dans des moules de cuisson en papier. Durant la levée, on procède à la scarpatura, la surface supérieure de la pâte est incisée d’une croix.

La cuisson dure environ 40 min à 170 °C pour un gâteau d’un kilogramme. A la sortie du four, le gâteau est renversé, la date est imprimée ou estampillée de manière indélébile sur le pirottino qui reste attaché au produit fini.

Le panettone est servi en tranches verticales, accompagné de vins doux comme l’asti spumante ou le moscato, ou encore de vins corsés du genre Recioto della Valpolicella ou Gattinara, ou encore de boissons chaudes. On peut compléter avec de la crème de mascarpone et de l’Amaretto, une liqueur sucrée.

Les Nevaditos espagnols

Dans un saladier, vous mélangez 100 g de saindoux avec 60 ml de vin blanc, une pincée de sel et une cuillère à soupe de sucre. Vous incorporez progressivement 225 g de farine à la cuillère de bois jusqu’à obtenir une boule de pâte bien lisse. Vous la filmez et vous la laissez reposer au froid pendant 2 heures.

Vous étalez la pâte sur du papier sulfurisé à 1 cm d’épaisseur et vous formez des disques de 6 cm à l’aide d’un emporte-pièce. Vous enfournez pour 30 mn jusqu’à ce que les bords soient légèrement dorés. Vous enrobez les nevaditos de sucre glace et les laissez refroidir complètement.

Les Stollen et Beerawecka alsaciens

En Allemagne et en Alsace où les traditions de Noël demeurent très vivaces, le Stollen (ou Christstollen) est composé de fruits secs macérés dans le rhum, d’écorces d’agrumes confites et de pâte d’amande.

Faites macérer 150 g de raisins secs, 120 g d’écorce d’orange et autant d’écorce de citron confit en cube dans un bol d’eau mélangée à quelques cuillères à soupe de rhum et une gousse de vanille fendue dans la longueur.

Dans un verre, mélangez 150 g de lait tiède avec 10 g de levure.

Dans un saladier, mélangez 250 g de farine, 40 g de sucre, 80 g de beurre, 1 jaune d’œuf, 120 g de noix et autant d’amandes et une pincée de sel.  Ajoutez ensuite le lait et la levure et mélangez jusqu’à obtention d’une pâte lisse. Laissez reposer une nuit.

Mélangez 200 g de poudre d’amandes avec 200 g de sucre glace, 4 cl d’eau et 2 gouttes de liqueur d’amandes amères. Réservez la pâte d’amande obtenue dans une poche à douille.

Le lendemain, étalez la pâte sur un papier sulfurisé pour obtenir un rectangle. Déposez au centre la pâte d’amande et refermez soigneusement le Stollen tout autour de la pâte d’amande.

Enfournez le gâteau pendant 40 minutes à 180°C. Laissez refroidir et saupoudrez abondamment de sucre glace.

Le Beerawecka est le gâteau traditionnel de la pâque juive, que les chrétiens ont emprunté pour les fêtes de Noël. La litanie des ingrédients est un peu longue :

– 400 g de poires séchées

– 100 g de quetsches ou prunes

– 150 g de figues séchées

– 150 g d’abricots secs

– 150 g de pommes séchées

– 150 g de raisins de Corinthe

– 100 g d’amandes

– 100 g de noisettes

– 100 g de noix

– 100 g d’écorces confites de citron, d’orange et de cédrat

– 20 g de cannelle

– 10 g d’anis moulu

– 5 g de clous de girofle moulu

– 500 g de farine

– 1 cuillère à café de bicarbonate

– 50 cl d’eau de vie de quetsche

Coupez tous les fruits en petits morceaux, arrosez-les d’eau de vie, remuez et laissez macérer une nuit.

Concassez les noix, amandes et noisettes. Egouttez les fruits et ajoutez la farine mélangée avec le bicarbonate et les épices, remuez et ajoutez l’alcool de macération jusqu’à ce que l’ensemble soit bien amalgamé.

Façonnez des petits pains allongés sur un papier sulfurisé. Enfournez à 140°C et laissez cuire 45 minutes.

Le Beerawecka peut se conserver au frais une dizaine de jours. Il peut être servi au petit déjeuner mais peut fort bien accompagner le foie gras.

Le pudding du Detroit

Remontons à présent vers le “Channel” et les rivages de l’Angleterre. A Calais et à Boulogne sur Mer, on a vécu très longtemps au rythme des “day tripper” venus pour la journée de Folkestone, Douvres et Ramsgate par ferry, avant de repartir les bras et les épaules chargés de chocolats, de fromages, d’alcools divers et variés, voire de grenouilles…

Le “Brexit” et le “Lien fixe transmanche” ont certes bouleversé ces habitudes, mais à Calais et à Boulogne on continue de préparer Noël avec le “Christmas pudding” tel qu’on la vu faire par les parents et les grands parents, qui eux-mêmes le tenaient d’amis ou de collègues anglais.

Le Christmas pudding est cuit à la vapeur avec énormément de raisins secs épépinés et de fruits confits, des noix, de la graisse de rognon de veau, du sucre brun (de la “cassonade” ou “vergeoise” brune) de la mélasse et un peu de farine. Le mélange est humidifié avec du jus d’agrumes et de la bière brune.

Le gâteau est ensuite enveloppé dans un tissu et suspendu quelques heures dans une cocotte au-dessus de l’eau bouillante.

Au moment de servir, le pudding est réchauffé à la vapeur et flambé au rhum. La tradition voudrait qu’on mange du pudding certes un peu rassis jusqu’à la Trinité.

Le sens pratique des Boulonnais(es) et des Calaisien(ne)s a substantiellement fait “évoluer” la tradition britannique : le graisse de rognon de veau est souvent remplacée par de la margarine, l’enveloppe en tissu par un saladier en pyrex, la cocotte en fonte par une cocotte minute qui permet de réduire le temps de cuisson ou autres cuiseurs-vapeurs à la mode, mais les yeux émerveillés des petits et grands au moment de flamber le gâteau, toutes lumières éteintes, sont toujours là, même si à Calais comme à Boulogne on tient rarement jusqu’à la Trinité …

Citrouille, potiron, courge, doubeurre : l’hiver est là

Charles Naudin est né en 1815 à Autun (Saône et Loire). Il suit des études en biologie à Montpellier et rejoint le Muséum d’Histoire naturelle en 1846, puis le lycée Chaptal.

Dès 1860 il décrit à la manière des botanistes une vingtaine de courges et autres potirons qui ne sont pas forcément tous issus de la même famille !

Une maladie neurologique le rend sourd. Cela ne l’empêche pas de rejoindre l’Académie des Sciences en 1863 où il publie différents travaux sur l’influence de l’hybridation dans l’évolution en botanique. En 1869, il s’installe à Collioure, il y crée un jardin privé expérimental, le jardin Palmar où il installe diverses essences et agrumes dont une incroyable bambouseraie et de majestueux et rarissimes palmiers aujourd’hui centenaires. La propriété classée a notamment accueilli Henri Matisse et André Derain, dans les années “fauvistes (1905-1906). Si cela vous intéresse, le domaine est à vendre, à 200 m de la plage…

Henri Matisse – Collioure

Quant à Naudin, il s’installe en 1878 au jardin botanique de la villa Thuret à Antibes (https://www6.sophia.inrae.fr/jardin_thuret/), magnifique domaine d’expérimentation botanique (appartenant toujours  à l’Etat) où il perd la vue !

Nonobstant, il dirige des travaux sur l’hybridation et l’acclimatation des plantes en vue de l’obtention de nouvelles espèces et l’hérédité en botanique. Cela l’amène à s’intéresser aux capacités qu’ont ou pas les végétaux à se reproduire par acclimatation, par hybridation.

Pour les horticulteurs Naudin est le “père” de la génétique botanique, notamment celle des potirons, courges, butternuts et autres citrouilles cultivés pour leurs propriétés gustatives. Pour les curieux, il s’est aussi beaucoup intéressé aux influences cosmiques en botanique (les jardiniers qui respectent les cycles lunaires sont légion).

Les “cucurbitacées” sont originaires des régions tropicales et subtropicales. Le potiron a suivi le même chemin que de nombreux végétaux : découvert en Amérique du Sud, il a été introduit en Europe et en Chine par les Portugais.

De nombreuses espèces sont cultivées pour leurs fruits comestibles (courges, courgettes, concombres, cornichons, doubeurres ou butternuts, melons, pastèques, chayottes, etc.) et parfois pour leurs graines (courge à huile, pistache africaine). En ce qui concerne l’Europe tempérée, nous utilisons principalement les potirons, les potimarrons, les courges, les citrouilles, les courgettes, les pâtissons, les courges musquées, les butternuts.

Ces derniers ont le vent en poupe, avec les potimarrons : leur chair n’est pas filandreuse, elle est parfumée, leur peau est fine.

Petite exception, les coloquintes, très décoratives, mais qu’il vaut mieux éviter de consommer : elles ne sont pas très digestes. Certaines d’entre elles peuvent occasionner des gastro-entérites hémorragiques sévères chez les chiens et les chats.

Comme c’est le cas avec le poireau (https://recettesahistoires.com/2022/11/18/la-noblesse-a-tout-faire-du-poireau/), le chou (https://recettesahistoires.com/2022/11/24/le-chou-la-fermentation-la-sante/)  ou la pomme de terre (https://recettesahistoires.com/2022/08/16/parmentier-le-vrp-de-la-patate/), les cucurbitacées, des “basiques” des cuisines depuis toujours donnent des idées de recréations aux cuisiniers les plus talentueux.

Potimarron aux truffes de Christian Constant

“Monsieur Constant” c’est ainsi que l’appellent tous ceux qui ont travaillé à ses côtés, comme Eric Frechon, Emmanuel Renaut, Jean-François Rouquette, Yves Camdeborde, Christian Etchebest, Thierry Faucher, Thierry Breton…

Après avoir passé sept ans à la tête du Crillon, Christian Constant ouvre le Violon d’Ingres et le Café Constant, rue Saint-Dominique, Les Cocottes à l’Arc de triomphe, à la Tour Eiffel, puis à Saint Julien en Genevois, Le Bibent place du Capitole à Toulouse et le Bistrot Constant à Montech, sa ville natale, le long du Canal du Midi. Depuis octobre 2022, il a commencé à se séparer de certains de ces établissements, préparant sagement sa retraite à 72 ans.

Epluchez 1 kg de potimarron, coupez la chair en dés. Ciselez un oignon que vous faites revenir au beurre jusqu’à ce qu’il devienne translucide. Ajoutez la chair de potimarron, 75 cl de fond de volaille, 50 cl de crème liquide entière. Laissez cuire à feu doux pendant une trentaine de minutes.

Dans une casserole, “glacez” 100 g de marrons avec un peu de jus de viande et de beurre. Taillez des petits dés avec deux tranches de pain de mie, faites-les dorer à l’huile et égouttez-les sur du papier absorbant.

Tranchez en copeaux 60 g de comté à l’économe.

Dans chaque assiette, versez du velouté de potimarron, des marrons émiettés, des copeaux de comté, des croûtons dorés et quelques brisures de truffe.

Courge-argousier-sarrasin

Mauro Colagreco est beaucoup plus jeune, né en 1976 à La Plata (Argentine). Il est chef et propriétaire du Mirazur à Menton (https://www.mirazur.fr/), élu “meilleur restaurant du monde” en 2019 par le World’s 50 Best Restaurants. Comme Christian Constant, Mauro est un habitué des studios de télévision et des émissions de télé-réalité culinaire. Il vient d’être désigné “ambassadeur de bonne volonté” de l’Unesco, l’institution de l’ONU spécialisée dans l’éducation, la science et la culture. Avec ce statut non rémunéré, il entend promouvoir les actions de l’Organisation en faveur de la biodiversité et contribuer à “rétablir notre lien avec la nature et préserver l’harmonie de nos écosystèmes.” (source Atabula : https://atabula.com/)

Il a dans sa besace cette recette d’une relative simplicité si l’on se réfère à sa carte, souvent beaucoup plus sophistiquée et assez onéreuse.

Pour 10 personnes

1 courge musquée de Provence (si elle est suffisamment grosse, elle suffira pour tous les éléments de la recette)

Beurre (50 g/kg de courge)

Pelez la courge, jetez les graines. Passez une partie de la pulpe à la centrifugeuse. Laissez réduire à la casserole aux trois quarts.

Coupez en fines tranches une autre partie de la courge. Placez-les dans une casserole avec le beurre, couvrez (avec du papier sulfurisé) et faites cuire à feu très doux, en remuant de temps en temps afin que la courge ne dore pas. Continuez jusqu’à obtenir une purée bien cuite. Découvrez et faites cuire quelques minutes supplémentaires pour que la purée soit sèche. Passez au mixeur

Mousse de courge

110 g de sucre

150 ml de jus de courge réduit

120 g de jaunes d’œufs

7,5 g de feuilles de gélatine

Placez le sucre avec 100 ml de jus de courge réduit dans une poêle et faites cuire jusqu’à ce qu’il atteigne 118 °C.

Simultanément, commencez à battre les jaunes d’œufs au mixeur. Ajoutez le sirop en filet à 118 °C et battez jusqu’à ce que le mélange atteigne la température ambiante. Réservez.

Faites chauffer 50 ml de jus de courge et ajoutez la gélatine hydratée et égouttée jusqu’à dissolution complète. Mélangez avec 200 g de purée de courge et incorporez doucement l’appareil aux œufs. Répartissez dans des contenants carrés et placez au frais.

Mousse de baies d’argousier

3 œufs

80 g de sucre

180 ml de jus d’argousier

10 g de feuilles de gélatine

100 ml d’eau

180 g de beurre

150 ml de jus de courge réduit

120 g de jaunes d’œufs

7,5 g de feuilles de gélatine

Blanchissez les œufs avec le sucre. Mélangez avec le jus d’argousier, placez dans une casserole et portez à ébullition, en remuant constamment jusqu’à 78 °C. Hydratez la gélatine avec de l’eau très froide, égouttez et ajoutez au mélange précédent. Ajoutez le beurre pommade et mélangez jusqu’à obtention d’une texture homogène. Répartissez la mousse d’argousier sur la mousse de courge sur 5 mm de hauteur. Remettez au frais.

Coupez la dernière partie de la courge et émincez-la à la mandoline, pour obtenir des lamelles fines et longues. Placez les tranches sur du papier sulfurisé. Badigeonnez-les avec une tasse de sirop. Placez-les dans un sac et mettez sous vide au maximum pour qu’elles absorbent le sirop.

Badigeonnez les portions de mousse avec du miel d’acacia et saupoudrez de sarrasin et de pollen. Faites une demi-quenelle de cette préparation et répartissez-la sur des assiettes. Recouvrez la quenelle de mousse avec les tranches de potiron.

Courges confites

Mauro Colagreco est aussi capable de vous proposer cette recette simplissime

Il vous faut :

3,5 l d’eau

1 courge butternut

20 g de bicarbonate

1 kg de sucre

1 gousse de vanille

Pelez et coupez la courge en cubes de 2 x 2 cm. Dans un saladier, mélangez 1,5 l d’eau avec le bicarbonate. Plongez les morceaux de courge, mélangez et laissez reposer au froid pendant 24 heures. Dans une casserole, faites bouillir 2 l d’eau avec le sucre. Ajoutez les morceaux de courge et la vanille puis laisser cuire à feu doux pendant 1h30. Après cuisson, remplissez le bocal propre et fermez hermétiquement. Stérilisez le bocal dans une casserole avec de l’eau bouillante pendant 30 minutes (le bocal doit être immergé entièrement). Ensuite, laissez refroidir 15 minutes hors de l’eau. Retournez les bocaux puis laissez refroidir totalement. Conservez à l’abri de la lumière pendant 3 mois. Une fois ouvert, vous pouvez le conserver au froid pendant 2 semaines.

Le chou, la fermentation, la santé

Les tomates ont dansé tout l’été,

les raisins sont vendangés,

les blés sont moissonnés,

les patates sont en purée,

Quand la bise fut venue,

d’un bond les légumes

se sont faits plus discrets

sur les étals de la cité

Refusant d’accepter de manger

des flocons et des surgelés,

notre estomac se réjouirait

de vitamines et de jus frais.

A l’automne allons déterrer

les navets et les racines.

Mais ses majestés de l’hiver

seront les choux de Pontoise et les cabus.

J’en resterai là avec les rimes et la prosodie. Cette complainte nostalgique est heureusement un peu naïve. Nos aïeuls ont depuis longtemps cherché et trouvé des parades aux caprices de la température et du soleil.

Et incontestablement, le roi des légumes des soirées froides c’est le chou que les Huns auraient ramené de leurs aventures en extrême orient.

Les marins savent depuis longtemps protéger leurs pêches et leur propre nourriture avec le sel. Les paysans utilisent un peu partout le salage, le séchage et la fumaison pour conserver les viandes et les poissons.

La choucroute met en œuvre une réaction chimique, la fermentation lactique ou lacto-fermentation. Très grossièrement, le glucose contenu dans la matière végétale se combine avec de l’eau et du sel, en l’absence d’oxygène, pour former des “bactéries lactiques” tout à fait recommandées par l’académie.

On retrouve cette technique de conservation dans de nombreux produits du quotidien : la choucroute, mais aussi les cornichons, les olives, le yogourt, les fromages, les saucissons…

Le principe de la lacto-fermentation est simple. Chacun peut se lancer dans l’aventure, avec un chou notamment. Il vous faut un chou finement émincé, 2% de sel et un bocal étanche !

Lançons nous dans une première choucroute. Les Alsaciens privilégient le “chou cabus quintal”.

Vous mettez votre chou émincé dans le bocal, n’oubliez pas de jeter quelques grains de sel entre les couches de chou.

Il faut utiliser du sel sans additif, ce qui n’est en général pas le cas du “sel de table” auquel on  adjoint des anti-agglomérants et de l’iode. Privilégiez le sel de mer ou sel gris, si possible bien sec. Le sel de l’Himalaya est un “must'”, comme le sel de Maldon, récolté dans l’estuaire de Blackwater, près de Maldon (Essex). Mais Guérande est aussi bien, sinon mieux.

Sel rose de l’Himalaya

Tassez bien pour expulser un maximum d’air et remplissez le bocal autant que possible avant de le fermer hermétiquement. On pourrait ajouter de l’eau pour créer un milieu “anaérobie”, mais le chou devrait rendre suffisamment d’eau pour faire ce travail. Il faut “oublier” ce bocal si possible à l’abri de la lumière, à la température de la maison, pas au froid. Comptez au minimum deux semaines avant le début de la fermentation, l’optimum étant deux mois.

Passé ce délai, il est possible d’ouvrir le bocal, pour goûter l’acidité provoquée par la fermentation. Il suffira de bien essorer le chou pour le consommer, cru ou cuit, avec de la charcuterie mais pas seulement, avec du poisson c’est délicieux, avec ou sans vin d’Alsace…

On peut procéder de la même façon avec des navets, des carottes, de l’ail.

Sang Hoon Degeimbre

En matière de fermentation, Sang Hoon Degeimbre est une référence. Installé à Liernu, entre Louvain et Namur, dans son restaurant L’air du temps (https://airdutemps.be), au-milieu d’un jardin de cinq hectares, il conjugue le milieu dans lequel il évolue avec ses origines coréennes.

Voici ses carottes lacto-fermentées pour lesquelles il vous faut

1 litre d’eau

500 g de carottes

30 gr de sel

2 gousses d’ail

1 oignon

1/2 poire en dés

100 g de gros sel

Brossez et nettoyez les carottes. Déposez-les dans un bac et recouvrez de gros sel. Laissez macérer 3h. Rincez à l’eau courante.

Dissolvez le sel dans l’eau dans un bocal hermétique. Ajoutez les autres ingrédients et les carottes (coupées si besoin). Fermez le pot et laissez à température ambiante pendant une semaine, puis en cave ou au frigo pendant au moins trois semaines avant dégustation.

Le kimchi est un peu l’ancêtre coréen de la choucroute, voici comment Degeimbre le prépare :

Chou Pe-Tsaï

750 g chou chinois Pe-Tsaï ou Pak-choï. Il existe de nombreuses variétés de chou chinois, mais ces deux-là se vendent et se cultivent aisément dans nos contrées

75 g de sel de Maldon

400 g d’eau

50 g de chou-rave

½ oignon

1 pomme

2 gousses d’ail

10 g de gingembre

15 g de pignons de pin

1 c à soupe de Nuoc-mâm, sauce liquide à base de poisson fermentée dans une saumure

1 c. à café de Saeujeot, ou Séou Jan (crevettes fermentées salées coréennes)

Dissolvez le sel dans l’eau. Plongez-y le chou entre 1 et 5 h.

Coupez en julienne le chou rave, l’oignon, la pomme. Emincez l’ail et le gingembre.

Mélangez le tout à la main avec le Nuoc-mâm et le Séou-Jan. Entaillez le chou 1 cm au-dessus du cœur et déchirez-le en deux. Entre chaque feuille, dispersez le mélange. Roulez le chou sur lui-même et enfoncez-le dans un bocal étanche d’1 litre. Pressez fort. Refermez et laissez fermenter pendant 10 jours à température ambiante puis conserver au frais.

Yannick Alléno

Yannick Alléno est une star. Les magazines se sont délectés de sa gueule d’acteur et de ses conquêtes. En mai 2022, son fils Antoine est mort, percuté sur son scooter par un chauffard, alors qu’il rentrait du restaurant qu’il venait de créer avec son papa.

Yannick est responsable des trois restaurants et des salons du Pavillon Ledoyen (https://www.yannick-alleno.com/fr/ ), propriété de LVMH, comme l’hôtel Cheval Blanc à Courchevel et le Royal Mansour à Marrakech, que le chef supervise également, ainsi que le bistrot du Palais de la Mutualité et celui du Palais Brongniart, un salon de thé à Saint-Tropez, des hôtels à Dubaï, à Séoul, à Pékin, à Taipei, à Monaco… Et le restaurant qu’il avait créé avec son fils (https://perefilsparalleno.com/ fastfood de qualité) a rouvert en octobre 2022.

Chou de Pontoise

Alléno sait pour le moins se “médiatiser” et se démultiplier à l’image d’Alain Ducasse, mais c’est avant tout un cuisinier qui continue d’explorer de nouvelles pistes et sait mettre en valeur des produits qui disparaîtraient sans des volontés comme la sienne. C’est le cas du chou de Pontoise, et de ses incroyables nuances de bleu, rose, vert, dont on disait qu’il ne pouvait pas voyager. Depuis longtemps, il explique que la marque de la cuisine française c’est la sauce : « Je souhaite que les gens comprennent que la sauce est le verbe de la cuisine française, qu’elle est la seule à pouvoir unir dans un rapport d’harmonie deux produits totalement différents pour former un plat cohérent. Mon but est de remettre la sauce au cœur du débat. On l’a diabolisée sous l’offensive hygiéniste qui nous a fait croire que la sauce était forcément trop grasse et mauvaise pour la santé. Si l’inconscient collectif est convaincu de cela aujourd’hui, c’est parce que pendant des années, les sauces étaient mal faites. C’est comme si un mauvais peintre copiait une œuvre de Picasso. A la fin, on obtiendrait une croûte. Pour les sauces, c’est pareil. Il faut du temps, de l’expérience. Un bon saucier, c’est 15 ans de travail ! » Il a ainsi étudié les méthodes d’extraction pour condenser la substantifique moelle d’un légume, d’un parfum. Il utilise pour cela la centrifugation, la cryogénisation avec des outils qui ne se trouvent pas forcément dans la première cuisine venue, mais qu’on peut imaginer. Plus récemment, il s’est intéressé aux ressources de la fermentation. Cf interview par Mathilde Bourge in https://www.finedininglovers.fr/article/yannick-alleno-le-gout-du-terroir-par-la-fermentation

Il présente ainsi une langoustine “snackée” servie sur un mélange d’extraction de céleri et de jus de chou fermenté.

On peut approcher ce goût avec des moyens relativement simples : vous passez un pied de céleri branche au mixer, vous filtrez soigneusement le résultat au-dessus  d’un récipient, et vous mélangez cela avec un peu de jus de chou fermenté. Après quelques tâtonnements vous devriez parvenir à obtenir un “miroir” légèrement sirupeux que vous napperez sur une assiette de service. Vous allez amoureusement décortiquer une “demoiselle de la mer” en conservant intacts le corps et la queue. Vous “châtrez” la bête en incisant le ventre sur sa longueur et en retirant délicatement à la pince le petit boyau noir. Vous “pochez” 10 minutes la langoustine au beurre noisette clarifié à 64°C, et vous terminez en la “flashant” quelques secondes à la salamandre.

La “noblesse à tout faire” du poireau

Nous avons la regrettable habitude d’affubler à nos nourritures familières des sobriquets souvent peu amènes : la patate, le navet, la vache, le veau, l’agneau, le merlan, le maquereau en sont quelques illustrations. Et dans la série, le poireau n’est pas en reste.

Attendre dans une queue c’est “faire le poireau” ; les motards amateurs englués dans le sable du Touquet sont des “poireaux” ; une verrue faciale est un “poireau”, comme la médaille du Mérite agricole ; un valeureux général est un “poireau” parce qu’il a la tête blanche mais est encore vert…

Le poireau est devenu l’emblème du Pays de Galles, avec le narcisse, même si l’effigie du drapeau gallois est un dragon. La légende prétend que les soldats de Sa majesté se seraient régalés de poireaux savoureux dans le champ d’un cultivateur du Pas-de-Calais à Azincourt entre Fruges et Hesdin, durant la bataille éponyme en 1415 et les auraient emportés comme trophées de cette victoire.

Du temps de François Ier les médecins en prônaient l’usage aux gens « mugueteurs de dames pour leur donner plaisante haleine »,  pour « favoriser la diurèse, relâcher le ventre, arrêter les éructations, augmenter le lait des nourrices et faire cesser la stérilité. »

Plus prosaïquement c’est ainsi que les “mâles dominants” désignent le pénis.

Ce légume membre de la famille des alliacées comme l’oignon, l’ail, l’échalote et la ciboulette nous est familier depuis les Egyptiens.

Il a la particularité d’être “bisannuel”. La première année de sa vie, la plante fait des réserves. Elle fleurira et montera en graines au printemps suivant pour se reproduire.

Le jardinier va donc privilégier la production de la première année. Les prévoyants savent pourtant qu’il est très utile d'”oublier” quelques plants dans le potager pour produire les semences de la saison suivante.

“Allium porrum”, alias le poireau, c’est un peu le cochon dans la cuisine : tout est bon chez lui, c’est un peu le maître-mot de cette chronique. Et vous allez voir, on peut avantageusement s’affranchir du sempiternel potage poireaux-pommes de terre qui berce les bols de notre enfance, même si amoureusement préparé celui-ci conserve de nombreux adeptes en France et même un peu plus loin qu’en Navarre.

Les radicelles frites

Il vous est désormais INTERDIT de jeter quoi que ce soit quand vous rapportez une botte de poireaux du marché (ou du potager).

Vous coupez vos poireaux à 1 cm du pied, vous lavez soigneusement à l’eau pure et fraîche ces pieds et radicelles et vous les faites tremper une bonne dizaine de minutes dans de l’eau vinaigrée puis dans de l’eau bouillante. Après les avoir séchés, vous ajoutez un peu de farine et vous les plongez dans l’huile à 180°C quelques minutes. Vous pourrez agrémenter votre fameux potage de cette friture croustillante ou compléter une salade, décorer une tarte, un flan de poireaux…

Cerise sur le gâteau, votre salade appréciera beaucoup que vous ajoutiez quelques fleurs et quelques graines de poireau qui apporteront une touche de couleur et une note aillée bienvenue.

Œufs mimosa, huile de poireau

Apicius

Apicius proposait sous l’empereur Auguste, au début de notre ère des œufs farcis avec des jaunes aromatisés à la marjolaine, au safran, aux clous de girofle broyés, au fromage), reconstitués, passés au gril et servis au vinaigre (cf https://recettesahistoires.com/2022/08/26/lucullus-et-apicius-ils-sont-fous-ces-romains/). Ils ressemblent aux diaboliques “deviled eggs” anglais farcis à la viande, au fromage et aux épices, saupoudrés de paprika. On en retrouve des déclinaisons un peu partout.

Lydie Salvayre

L’œuf mimosa est une recette bien française datant des années 1920, en référence à la plante méditerranéenne qui fleurit à la fin de l’hiver. Mais “l’œuf dur mayo” renaît dans les brasseries et bistrots. Il a même son championnat du monde remporté cette année par Grégoire Simon, chef de la Grande Brasserie (6, rue de la Bastille). Gageons qu’avec une égérie comme Lydie Salvayre, récente Prix Goncourt, il a l’avenir devant lui : ” J’ai pleuré longtemps en imaginant l’ennui qui allait me terrasser dans les jours prochains car je venais d’achever ma seule relation humaine. Puis j’ai repensé à la façon dont elle avait mangé la garniture de salade qui accompagnait les œufs mimosa, sans la moindre pause langagière, sans la moindre expression humaine, sans lever les yeux, comme une bête, et tout mon chagrin s’est évanoui. ” 

Vous faites cuire 10 œufs à l’eau bouillante, puis vous les refroidissez à l’eau froide. Ecalez-les et coupez-les en deux et récupérez les jaunes.

Couper le vert de deux poireaux, et mixez-le avec 0,5 l d’huile de tournesol. Si vous êtes équipé, passez ce mélange à la centrifugeuse. Sinon, à l’aide d’une fine passoire et d’une cuillère, pressez vigoureusement  le solide au-dessus d’un récipient pour récupérer “l’huile de poireau” filtrée à travers la passoire. Laissez reposer au moins 20 minutes pour que l’eau et l’huile se séparent.

 Mettez de côté trois jaunes et mélangez les autres avec trois jaunes crus, une grosse cuillère à soupe de moutarde, du sel, du poivre. Et montez une mayonnaise avec l’huile de poireau que vous venez de filtrer.  Remplissez les blancs avec cette mayonnaise et les jaunes mis de côté coupés en cubes.

Poireau et foie gras

Canard mulard

J’entends déjà dans les chaumières les cris d’orfraie : “Quoi quoi ! Il veut encourager le gavage et l’assassinat de ces pauvres bêtes !”

Que ces bonnes âmes et les disciples de Hugo Clément et Aymeric Caron se rassurent, je ne retournerai ma veste ni dans un sens ni dans l’autre (je ne suis ni pour ni contre, bien au contraire comme disait Coluche)…

Je sais en revanche que l’élevage des canards gras et l’élaboration des foies gras sont le résultat d’une culture millénaire, qui a forgé des paysages, une économie dans les régions de production. Les antispécistes, mais surtout la grippe aviaire menacent l’équilibre et l’avenir de nombreux petits paysans et de leurs familles.

Pour ce qui suit, il vous faut donc 150 g foie gras cru de canard, de belle couleur mastic, souple et ferme à la fois, du gros sel marin, du poivre de qualité (Kampot par exemple, cf https://recettesahistoires.com/2022/11/04/le-poivre-prince-des-epices-et-des-voyages/), de quatre beaux poireaux et du vinaigre de vin vieux.

Préparez les poireaux dont vous ne conservez ici que les blancs. Lavez-les soigneusement, plongez-les dans l’eau bouillante salée pendant 20 minutes au moins. Le poireau doit être fondant. Egouttez les tronçons verticalement et réservez-les au chaud.

Coupez des tranches de foie gras de 1,5 cm d’épaisseur, poivrez et saisissez-les à bonne température dans une poêle anti-adhésive (une minute de chaque côté). Jetez cette première graisse, égouttez les tranches sur du papier absorbant, mettez-les dans un  plat et passez-les au grill 3 minutes.

Récupérez la graisse de la cuisson au four, ajoutez le vinaigre (2/3 de graisse, 1/3 de vinaigre). Disposez le foie gras sur les poireaux, ajoutez la vinaigrette et quelques grains de gros sel.

Poireau calciné, tartare d’huîtres

Eric Fréchon est un Picard, qui a entamé sa carrière en cuisine au Petit Café Bleu (aujourd’hui le Homard Bleu) au Tréport. A l’époque, son projet professionnel était juste de se payer un vélo ! Aux fourneaux triplement étoilés du palace parisien le Bristol (112 Rue du Faubourg Saint-Honoré) il conserve le sens de la simplicité de cette époque et le goût des produits auxquels il apporte sa technicité, sa précision, sa culture et sa curiosité de Meilleur ouvrier de France.

Il raconte que sur une plage sénégalaise il avait été attiré par l’odeur des huîtres que des pêcheurs faisaient griller au barbecue. Les mollusques étaient un peu carbonisés, mais il en avait conservé la mémoire gustative, et son association avec des poireaux grillés est désormais une “signature”.

Il vous faut des gros poireaux, que vous allez tailler à 23 cm de longueur en préservant les radicelles. Ils sont soigneusement lavés, les radicelles sont ensuite protégées avec du papier d’aluminium. Vous allez les cuire sous la salamandre (ou à la braise en saison si vous êtes équipé), en les tournant régulièrement pour qu’ils soient grillés sur toutes les faces.

Au Bristol, on pratique une incision pour extraire des tronçons de 2 cm de long qu’on remet ensuite en place dans la carcasse du légume savamment carbonisé.

Ouvrez ensuite huit huîtres (Fréchon préconise des “perles blanches” n°2), récupérez leur eau, ébarbez-les et réservez au frais. Taillez 100 g des barbes, faites-les “raidir” à la poêle et mélangez-les avec 100g de beurre aux algues. Réservez au frais.

Taillez la chair d’un citron en brunoise, mélangez-la avec 30 g de jus de citron, 40 g d’eau des huîtres et un peu de vinaigre (de Xérès par exemple). Ajoutez un peu d’échalote hachée, un peu de cébette, les huîtres hachées, sel poivre. Vous avez fabriqué un “tartare d’huîtres”.

Dans chaque tronçon de poireau, déposez des cubes de beurre d’algue, passez au four (200°C). Ajoutez ensuite quatre huîtres par poireau (les mêmes “perles blanches” n°2, ce qui vous fait au total deux douzaines d’huîtres pour 4 personnes). Repassez au four 3 minutes.

Au dernier moment ajoutez une cuillère de tartare auquel vous aurez ajouté 40 g de beurre d’algues fondu, de la ciboulette ciselée et des petits croûtons de pain finement coupés.

Christophe, Paul, Maurice, et le chocolat

Christophe Colomb : ce nom ne vous est pas étranger, forcément. Ce fabuleux aventurier, qui décide contre vents et marées de traverser la “Mer océane” en naviguant vers l’ouest sur la Santa Maria et qui découvre l’Amérique (en fait les Caraïbes) en 1492 en pensant être arrivé aux Indes.

Le bougre ne se contente pas de l’aller-retour : il  refait le chemin trois autres fois. Il semble plus à l’aise pour trouver le cap en observant les étoiles que pour administrer les territoires sur lesquels il pose le pied. Il n’a pas non plus un sens de l’observation très développé : au retour de son deuxième voyage, en 1494, il jette par dessus bord les sacs de fèves de cacao que les Amérindiens lui ont offert en cadeau de bienvenue. Il les aurait prises pour des crottes de chèvres ! Il lui faudra un troisième voyage sur l’île de Guanaja, en 1502, pour qu’il prenne conscience des ressources du cacao…

Il faut dire que le “xocoatl“, la boisson qui lui avait été offerte, ressemble plus à une punition ou à un médicament. Le chocolat que nous consommons aujourd’hui a été profondément amélioré depuis que les Mayas ont commencé à cultiver les cacaoyers, en l’an 600 de notre ère. La matière première subit en effet de nombreuses manipulations pour en arriver au chocolat noir à 70% de cacao que les pâtissiers utilisent dans leurs laboratoires.

La fève est fermentée, torréfiée, broyée pour former une pâte liquide dont on extrait la matière grasse, le “beurre de cacao“.

Le chocolat est constitué d’un mélange de pâte, de beurre de cacao et de sucre, dans des proportions tenues secrètes par chaque fabricant. A cela on ajoute l’assemblage des crus du chocolat, puisqu’on cultive des fèves dans les régions équatoriales des cinq continents, et qu’il existe des différences sensibles entre les variétés régionales de fèves.

Il y a donc chocolat et chocolat, des variétés plus ou moins nobles et des techniques d’extraction et de fabrication très différentes, à l’image des vins, des cafés… 

Aujourd’hui, le cacao est une marchandise éminemment spéculative, objet des mêmes excès que le sucre, les céréales, le soja, l’huile de palme… On produit cinq fois plus de fèves aujourd’hui qu’en 1960, avec les risques inhérents de déforestation et de monoculture. Et la grande majorité des fèves issues des pays équatoriaux est traitée… en Europe !

En couleur chocolat les pays producteurs des 5,7 millions de tonnes annuelles, en rouge la Côte d’Ivoire et le Ghana (60% de la production mondiale)

Vous voulez essayer le “xocoatl” ?

Les Mayas et les Aztèques attribuent à ce breuvage des vertus sacrées et magiques. Il est consommé dans des rituels censés apporter force et énergie, sous l’effigie de Xochiquetzal, déesse aztèque de l’amour et de la beauté.

Xochiquetzal, déesse de la fécondité, patronne du chocolat

Pour une tasse, il vous faut

1 cuillère à soupe de cacao en poudre,

25 cl de liquide (eau si vous voulez jouer les Incas, lait autrement),

¼ de gousse de vanille,

1 pincée de cannelle,

1 pincée de piment rouge (ou 1/8 de piment si votre gosier est habilité),

½ cuillère à café de miel.

Dans une petite casserole versez le liquide, avec le miel, la vanille, la cannelle. Mélangez et portez à ébullition. Laissez reposer hors du feu pendant une vingtaine de minutes. Ajoutez le piment et le cacao et réchauffez à feu très doux.

Filtrez pour ôter les morceaux de vanille et de piment, fouettez la préparation jusqu’à obtenir un mélange bien mousseux.

Cuissot de sanglier, sauce au cacao

Je n’ai pas de sympathie particulière pour les chasseurs, notamment les “viandards” qui privatisent la campagne, les bois et les villages jusqu’à l’heure de l’apéritif. Mais j’entends suffisamment fort les agriculteurs qui se lamentent des dégâts occasionnés par les hardes de sangliers, pour considérer qu’un bon cuissot n’est pas de nature à bouleverser l’équilibre de notre vieille planète.

Faites mariner le cuissot pendant 8 jours dans un mélange “tant pour tant” de vin, de vinaigre et d’eau à la bonne quantité pour tout recouvrir. Ajoutez 500 g de carottes et d’oignons coupés en dés. N’oubliez pas le bouquet garni, une tête d’ail, une cuillère à soupe de grains de genièvre. Remuez la bête et le liquide régulièrement.

Dans une “braisière” aux dimensions adaptées au cuissot, faites dorer sur tous les côtés la pièce de viande avec 100 g de beurre et de saindoux. “Singez” avec 3 bonnes cuillères de farine. Mouillez avec 50% de marinade et 50% d’eau chaude. Ajoutez la garniture aromatique de la marinade et laissez cuire (1 heure pour le 1er kg de viande, ½ h pour le kg suivant. Exemple : votre cuissot pèse 4 kg, la cuisson durera 2 h 30).

Dans une casserole faites bouillir un verre de vinaigre avec deux cuillères à soupe de sucre, un peu de beurre manié (beurre + farine 50-50), 2 verres de bouillon de cuisson de la viande. Laissez bouillir quelques minutes en fouettant, ajoutez 300 g de raisins secs, 1 cuillère à soupe de cacao en poudre. Laissez cuire 15 minutes. Avant de servir, rallongez d’un peu de bouillon et d’une cuillère à soupe de cognac.

Pâtes au cacao

Dans un bol, mettez 360 g de farine, 4 œufs, de l’eau (la quantité dépend beaucoup de l’humidité contenue dans la farine et celle de la pièce, disons ½ verre) et 40 g de cacao. Pétrissez jusqu’à ce que le mélange soit homogène. Laissez reposer la pâte au moins une heure, enveloppée dans un torchon.

Etalez ensuite la pâte au rouleau (1mm) et découpez des lamelles (tagliatelles) que vous posez sur un torchon fariné.

Dans une casserole, versez l’équivalent d’un verre de lait, dans lequel vous faites fondre 200 g de gorgonzola. Ajoutez des noix en poudre, sel et poivre.

Faites cuire les tagliatelles dans de l’eau salée pendant 10 minutes. Ajoutez la sauce.

La mousse de Paul Bocuse

La mousse au chocolat est emblématique de l’arrivée du chocolat dans chaque foyer. Depuis Christophe Colomb, le cacao a certes passionné quelques spécialistes, et les tables royales. Mais son essor date de la révolution industrielle et de la construction d’usines de transformation en Europe (Menier en France, Kohler en Suisse, Fry&Sons, Van Houten, puis Nestlé, Lindt, Tobler, Suchard…)

On dit que Monsieur Paul (Bocuse) avait l’habitude de prendre le petit déjeuner régulièrement chez son ami Maurice Bernachon, cours Franklin Roosevelt à Lyon.

Paul, Maurice, le Président, des fèves, des plaques et des truffes

Tous deux étaient suffisamment complices pour qu’en 1975, lorsque Valéry Giscard d’Estaing décore le chef de Collonges-au-Mont–d’Or de la Légion d’Honneur (une première pour un cuisinier depuis Escoffier), les deux compères préparent en secret un gâteau inédit qu’ils emmèneront à l’Elysée : le “Président”, toujours en vente dans la boutique, à côté des éternels “palets d’or” et quelques autres trésors. Le fils de Maurice, Jean-Jacques, intègrera la brigade de Bocuse en 1968 avant de se marier avec Françoise, la fille de Paul. Les enfants du couple sont aujourd’hui aux commandes de la maison Bernachon.

Voici la mousse au chocolat telle qu’on continue de la proposer dans les restaurants et brasseries Bocuse.

Pour 6 ramequins, il vous faut :

5 œufs

130 g de chocolat (70% de cacao)

30 g de beurre

40 g de sucre en poudre

Faire fondre au bain-marie le chocolat cassé en petits morceaux et le beurre à feu très doux en mélangeant à la spatule en maintenant une température maximale de 43°C.

Cassez les œufs et séparez les jaunes des blancs d’œufs.

Montez les blancs d’œufs en neige à l’aide d’un robot jusqu’à ce qu’ils tiennent aux branches du fouet. Incorporez le sucre petit à petit quand les blancs sont fermes et continuez de fouetter. Ajoutez les jaunes d’œufs, puis le chocolat fondu en soulevant très délicatement. Mettez la mousse dans les ramequins et laissez reposer 2 heures minimum au réfrigérateur. Râpez et déposez des copeaux de chocolat sur la mousse.

Le poivre, prince des épices et des voyages

En 1664, Colbert implante la compagnie des Indes orientales à Saint-Malo, pour développer les échanges avec l’Asie. Les affaires vont et viennent, mais la curiosité des Bretons pour l’Asie et ses saveurs ne s’est jamais démentie depuis.

Jean-Baptiste Colbert

“Les épices sont à la cuisine ce que la ponctuation est à la langue française. Comme la ponctuation révèle les mots, les épices permettent de révéler la face cachée des mets”. C’est Olivier Rœllinger, le magicien de Cancale, à quelques encablures du Mont Saint-Michel et de la cité des corsaires de Saint-Malo qui s’exprime ainsi.

Comme tout Breton qui se respecte, Olivier Rœllinger préfère aux rivières tranquilles les flots changeants, les vents siffleurs et les déferlantes de la grande bleue. Et les courants contraires il a connu !

Lorsqu’il a 14 ans, son père médecin abandonne le foyer. L’adolescent vit avec sa maman dans la maison de Bricourt, une demeure que sa famille avait acheté à des descendants de Surcouf, le corsaire malouin. En 1976, il a 21 ans et il est agressé par cinq inconnus dans les murs de Saint-Malo. Le futur ingénieur des Arts et Métiers est laissé pour mort, les jambes brisées, le crâne fracturé.

Robert Surcouf, Malouin corsaire de Sa majesté

Cloué sur un lit, puis en convalescence pendant deux ans, Olivier aura tout le temps nécessaire pour réfléchir à son avenir. Il reprend surtout goût à la vie dans la cuisine de la maison de Bricourt, aux côtés de sa maman Suzy, de Jane sa compagne et des amis qui viennent leur rendre visite.

Son projet prend corps très vite : ouvrir un restaurant avec Jane dans la “malouinière” d’enfance. En 1982, le restaurant Le Bricourt ouvre, en 1983 création du mélange d’épices Retour des Indes. En 1984, première étoile Michelin, la deuxième en 1988, la troisième en 2006. Entretemps, les Rœllinger ouvrent à Cancale un autre établissement, le Château Richeux, maison d’hôtes et restaurant, une boutique d’épices, et ils ont un enfant, Hugo !

En 2008, Olivier doit rendre son tablier : les séquelles de ses blessures de 1976 ne lui permettent plus d’être opérationnel en cuisine comme il l’imagine. Il reconvertit ses « pianos » en laboratoire de recherche et se consacre pleinement à sa passion pour le poivre en particulier et les épices en général. Les équipes des cuisines s’installent au château Richeux (deux étoiles aujourd’hui), en compagnie de Hugo qui a décidé de s’installer au fourneaux après quelques années dans la marine marchande. Mathilde, deuxième enfant du couple revient dans le giron familial après avoir fréquenté pendant 8 ans le Barreau de Paris.

De Saint-Malo à Phnom Penh

Les Bretons sont entreprenants, surtout lorsqu’il est question de voyages… et d’épices. Et en matière de poivre, le Cambodge est une référence incontournable.

Depuis 2016, le poivre de Kampot, une ville sur la côte du Golfe de Thaïlande, à 150 km de la capitale Phnom Penh, détient le précieux label IGP (indication géographique protégée) décerné par l’Union européenne qui garantit la spécificité d’une zone géographique pour une production agricole. Il existe d’autres poivres de grande qualité dans le monde, mais la reconnaissance  d’un cahier des charges spécifique est pour les agriculteurs cambodgiens un solide atout d’avenir (seule IGP pour le poivre aujourd’hui avec le Penja du Cameroun).

Les haut-lieux des grands poivres du monde

Il est encore un peu difficile de trouver ce précieux poivre, mais les producteurs s’organisent pour mettre en place des filières d’exportation performantes.

www.kampotgardenshop.com

Ce royaume de 17 millions d’habitants a vécu un XXe siècle tragique avec la guerre du Vietnam voisin, la guerre civile qui a fait près de 300 000 morts entre 1967 et 1975, suivie de la dictature du sinistre Pol Pot (près de 2 millions de victimes). Le bilan de ces années d’enfer est loin d’avoir été tiré : seuls cinq anciens responsables khmers rouges ont été jugés, trois ont été condamnés. Le pays se relève à peine de cette épouvantable descente et le PIB par habitant est en-dessous de la moyenne régionale, au même niveau que beaucoup de pays de l’Afrique sub-saharienne.

Le chaos installé par les Khmers rouges a débouché sur une catastrophe humanitaire dont sont victimes en premier lieu les enfants, orphelins ou livrés à eux-mêmes, notoirement peu scolarisés, qui vivent d’expédients, à Phnom Penh notamment. De nombreuses ONG tentent de venir à leur secours et ont créé par exemple “Les restaurants des enfants” qui leur offrent chaque jour plusieurs centaines de repas, accompagnés d’actions pour leur scolarisation, leur accompagnement sanitaire et social…

http://www.lesrestaurantsdesenfants.org/

https://www.facebook.com/lesrestaurantsdesenfants

Vin chaud aux agrumes et aux épices

Il vous faut 1 anis étoilé (Badiane), un peu de noix de muscade

4 cl d’alcool distillé (cognac, calva, whisky…), 125 g de sucre, 10 grains de poivre noir, 3 clous de girofle, ¼ citron, ¼ orange, 2 bâtons de cannelle, 75 cl de vin rouge.

Extrayez les zestes de citron et d’orange. Versez le vin et l’alcool fort dans une casserole et portez le tout à ébullition à feu moyen.

Ajoutez le sucre, les bâtons de cannelle, les clous de girofle, les grains de poivre, les zestes de citron et d’orange.

Râpez un peu de noix de muscade et de gingembre. Laissez mijoter doucement pendant 20 minutes. Filtrez le tout pour enlever les épices.

Servir bien chaud dans des verres ou des tasses transparentes. Ajoutez éventuellement une rondelle d’orange

Faux-filet de bœuf au poivre de Kampot

Procurez-vous 200 g de faux-filet, de la coriandre et de l’oseille fraîches, 1 tige de citronnelle, 10 grains de poivre noir de Kampot concassés, 1 oignon frais, 1 citron vert, un fond de veau, du sel.

Rincez et hachez grossièrement les herbes fraiches et disposez-les sur une assiette, avec des tronçons de citronnelle et des oignons frais ciselés. Concassez le poivre de Kampot au mortier (Olivier Roellinger préconise d’acheter des grains de qualité, en petite quantité. La moyenne des poivres utilisés en cuisine sont entreposés depuis … cinq ans et ont perdu tout leur parfum), coupez en deux le citron vert.

Dans une coupelle, ajoutez une pincée de sel, de sucre, le fond de veau et le poivre. Badigeonnez la viande avec le mélange obtenu, puis faites-la cuire à la poêle. Une fois cuite, laissez-la reposer.

Coupez la viande en grosses tranches, disposez-la sur les herbes fraîches.

Préparez la sauce : dans un bol, ajoutez le jus d’un citron puis 2 cuillères à café de sel, 1 de sucre et 1 de poivre. Mélangez le tout.

Servez la viande avec du riz, du chou sauté et la sauce.

Soupe de pastèque et glace à l’avocat

Coupez une ½ pastèque en quartier, éliminez l’écorce et les graines, coupez la chair en cubes. Passez au blender avec dix grains de poivre noir, un peu de basilic, quelques feuilles de menthe, 3 cuillères à soupe de sirop d’agave et une cuillère à café de piment d’Espelette. Réservez au frais.

Mixez la chair de 2 gros avocats avec 25 cl de crème fraîche épaisse, 20 g de miel de châtaigne. Passez à la sorbetière pendant une trentaine de minutes. Versez ensuite dans un saladier réservé au congélateur.

Dans de petites assiettes creuses, servez la soupe, déposez au centre une boule de glace, surmontée d’une feuille de menthe.

Quand les saints et les morts reviennent

Qu’ils croient ou pas à la vie éternelle, les vivants honorent les morts de cette terre. Nous avons tous besoin de rappeler à notre mémoire celles et ceux que nous avons connus, côtoyés, aimés, et qui sont partis avant nous.

Les morts, nos morts nous aident à nous souvenir que nous ne sommes que de passage et nous éprouvons la nécessité d’accompagner leur mémoire avec dignité. C’est la définition du sacré : nous respectons ce qui nous dépasse.

Et très souvent, nous accompagnons ce goût ou ce besoin du sacré avec des nourritures. Les grandes fêtes religieuses s’accompagnent de traditions gourmandes solides et liquides, quitte parfois à ce qu’elles supplantent ce qu’elles prétendent honorer.

Et n’en déplaise aux traditionalistes de tout poil, l’origine de la fête de la Toussaint n’est pas seulement chrétienne.

La fête de Samaïn

Pour les Celtes d’Irlande, d’Ecosse et du Pays de Galles, la fête de Samaïn marquait le début de l’automne et la nouvelle année. Problème, les Anglo-celtes utilisent un calendrier lunaire qui ne possède pas la régularité de nos habitudes solaires.

Les papes Grégoire III et Grégoire IV (huitième et neuvième siècles) ont décidé de fixer au 1er novembre la fête des saints qui avait lieu après Pâques ou la Pentecôte, à proximité immédiate de cette fête celtique. Et Halloween, quoiqu’on dise, est un héritage de la tradition gaélo-celtique. Le terme est une altération archaïque anglaise pour désigner la “veille de tous les saints” (All Hallows’ Eve)

Jack-o’-Lantern, le héros symbolique d’Halloween, était condamné à errer éternellement dans l’obscurité entre l’enfer et le paradis en s’éclairant d’un tison posé dans un navet. Dans les plaines de Flandres notamment, on utilisait aussi la betterave. Le navet et la betterave ont progressivement été remplacés par la citrouille.

Les émigrants irlandais et écossais fuyant la famine ont introduit la fête d’Halloween aux Etats-Unis et au Canada, d’où elle a inondé la planète à partir de 1920, avec le précieux concours des dessinateurs de BD puis de dessins animés.

Petite virée à travers les sucreries concoctées dans les échoppes d’Europe et d’ailleurs pour le plaisir des plus petits mais pas que…

Les papassini sardes

Dans les ruelles de Cagliari en Sardaigne, les enfants vont de porte en porte et demandent une obole pour les défunts. La tradition veut qu’à cette occasion, les morts reviennent sur terre se mélanger aux vivants et on laisse donc le soir la table prête avec un repas pour les défunts. Ils se régalent paraît-il d’une assiette de papassini et les vivants aussi.

Comme souvent ces recettes de tradition orale ne sont pas gravées dans le marbre et varient suivant les quartiers et les régions. Mais tous ont une forme de losange et contiennent des raisins secs, papassa étant un type de raisin sec très répandu en Italie.

Les anciens regrettent que ces gâteaux traditionnels soient aujourd’hui recouverts d’un glaçage et de petites paillettes psychédéliques.

Pour fabriquer des papassini, il vous faut

250 g de farine

3,5 cl d’huile d’olive

10 cl d’eau tiède

Dans un saladier, mélangez ces ingrédients et formez une boule que vous couvrez et laissez reposer 30 mn à température ambiante.

Pendant ce temps préparez la farce : 250 g de ricotta (fromage blanc italien), 75 g de sucre, le jus d’un ½ citron et un peu de zeste, 1 g de safran, 1 jaune d’œuf et 30 g de farine mélangée à de la poudre à lever, des “papassa” (130 g) réhydratés dans de l’eau, 130 g d’amandes pelées, grillées et hachées et un peu d’extrait d’amande. Laissez reposer pendant 15 mn.

Avec la première pâte, formez les “pardulas“. Etalez-la sur 3 ou 4 mm d’épaisseur, découpez des disques de 10 cm de diamètre à l’emporte-pièce. Sur chaque disque, déposez au centre 2 cuillères à café de farce. Relevez les bords de façon à former un petit panier, pincez les bords pour que chaque gâteau ait la forme d’un soleil. Déposez les gâteaux sur un papier sulfurisé et enfournez à 160°C pendant 30 mn. Laissez refroidir sur une grille.

Le pain des morts de Lombardie

Depuis cette région centrale et riche de la Péninsule, le “pain des morts” a essaimé dans toute la Péninsule. Il est censé nourrir à la fois les vivants et les morts qui viennent rendre visite à cette occasion à leurs successeurs.

Il vous faudra pour cela

6 blancs d’œufs

300 g de sucre

un peu de levure

100 ml de “vino santo”, blanc liquoreux toscan

500 g de biscuits macarons

50 g de cacao en poudre

250 g de farine

120g de raisins secs, autant de figues sèches et d’amandes

cannelle, noix de muscade

Dans un mixeur, réduisez les biscuits puis les amandes et les figues.

Dans un bol, ajoutez à ce mélange le sucre, la farine, le cacao et les épices puis le vin avec les blancs d’œufs, la levure. Terminez par les raisins secs.

Confectionnez des navettes de 100 g et de 1 cm d’épaisseur. Enfournez à 180°C pendant 20 mn, saupoudrez de sucre glace et laissez reposer pendant au moins deux jours.

Les niflettes de Provins

A Provins, on n’a pas attendu qu’Alain Peyrefitte et Christian Jacob soient maires de ce chef-lieu de Seine-et-Marne pour fabriquer des niflettes, vendues par douzaines dans toutes les bonnes pâtisseries au moment de la Toussaint. On raconte qu’au Moyen-Age, elles étaient offertes aux orphelins à la sortie des cimetières,  « niflette » venant du bas latin Ne flete !  : Ne pleure pas  !

La tour de Belem

Les niflettes sont de petites tartelettes en pâte feuilletées garnies d’une crème délicatement parfumée à la fleur d’oranger. Elles  ressemblent furieusement aux “pasteis de Nata” qu’on sert à Lisbonne, près de la magnifique tour manuéline de Belem, à l’embouchure du Tage. Au Portugal comme en Seine-et-Marne on affirme qu’on fabrique ça depuis le Moyen Age et qu’on est donc “les premiers”. Petit avantage pour les Portugais : on sert les “pasteis” toute l’année, pas seulement à la Toussaint

La tresse de Toussaint bavaroise

L’Allerheiligenstriezel est une brioche tressée composée de farine, d’œufs, de levure, de shortening (l’équivalent de la végétaline) ou de beurre, de raisins secs, de lait, de sel et de sucre perlé, d’amandes effilées ou de graines de pavot. Parfois, elle est parfumée au  rhum ou au jus de citron ou même aux deux.

Elle est offerte aux filleuls par leurs parrains pour la Toussaint. Dans les anciens cultes funéraires, le deuil s’exprimait par la coupe des cheveux tressés d’une femme.

Les dedos de bruja

ou doigts de sorcière espagnols

En Espagne, on roule une pâte sablée et sucrée à laquelle on a ajouté des amandes en poudre. On forme des cylindres d’une dizaine de centimètres auxquels on donne une forme de doigts ridés. A l’une des extrémités, on colle une amande non émondée avec un peu de gelée de groseille (ou de framboise). On colore le tout au jaune d’œuf et on enfourne (190°C) pour une dizaine de minutes. Il existe une version salée de ces doigts de sorcière, sans sucre, avec de la sauce tomate à la place de la confiture de groseille.

Les huesos de santo

ou os de saints madrilènes

Fabriquez une pâte d’amande avec 100 g d’amandes crues émondées, 80 g de sucre et 40 ml d’eau. Dissolvez le sucre dans l’eau et vous amenez à ébullition. Hors du feu ajoutez lentement les amandes réduites en poudre en pétrissant pour obtenir une pâte bien lisse, un peu collante. Laissez reposer au froid 1 heure au moins. (On ne vous en voudra pas si vous vous procurez de la pâte d’amande toute prête…)

Sur une plaque saupoudrée de sucre glace, formez des carrés de pâte d’amande de 5 cm et 3 mm d’épaisseur, tracez des sillons espacés de 1 cm et formez des petits cylindres autour d’une cuillère de bois.

Faites un sirop avec 100 g de sucre et 50 ml d’eau, portez à ébullition et laissez refroidir ; dans un saladier, battez quatre jaunes d’œufs avant d’ajouter graduellement le sirop refroidi sans cesser de remuer. Faites cuire au bain-marie pendant 20 mn en remuant constamment, jusqu’à obtenir une crème épaisse. Laissez refroidir.

Fourrez les cylindres par leurs deux extrémités avec cette crème refroidie à la poche à douille. Recouvrez de glaçage et laissez sécher sur une grille.

Les “os de saints” peuvent se conserver dans un récipient hermétique

Les Soul Cakes

de Grande Bretagne

Chaque “gâteau de l’âme” représente l’âme d’un défunt. Ils étaient distribués en récompense aux chanteurs (soulers), des enfants et des pauvres qui allaient de porte en porte en chantant des prières pour les morts. Cette tradition est à l’origine de la menace “Trick or Treating” lancée par les enfants.

Ils sont composés de

– 375 g de farine,

– 1 pincée de sel,

– 2 cuillères à café de noix de muscade râpée,

– 2 cuillères à café de mélange 4 épices,

– 185 g de beurre mou,

– 155 g de sucre en poudre,

– 90 g de raisins secs blonds,

– 1 œuf,

– 12 cl de lait.

On rassemble tous les ingrédients pour former une pâte homogène. On forme des petits cercles de 8 cm environ, on trace deux diamètres perpendiculaires. On décore ces diamètres en ajoutant des raisins secs. On enfourne 10 mn à 220°C.